Théâtre
Charles Juliet à la Maison de la Poésie : apaisé, apaisant

Charles Juliet à la Maison de la Poésie : apaisé, apaisant

15 February 2014 | PAR La Rédaction

Invité à la Maison de la Poésie le 13 février 2014, suite à la publication en novembre dernier du septième volume de son Journal (1997-2003) intitulé Apaisement, Charles Juliet a fait salle comble, et émerveillé son audience.

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LambeauxLauréat du prix Goncourt de la poésie-Robert Sabatier depuis décembre 2013, l’auteur – dont beaucoup ne connaissent que le récit autobiographique, Lambeaux, paru en 1995 – brille par l’humble simplicité de ses interventions. Dans la grande salle de la Maison de la Poésie, à l’entrée nichée dans le passage Molière, les lecteurs et curieux attendent avec une impatience enfantine l’arrivée du poète.

La rencontre est d’abord animée par Bernard Pivot, récemment désigné président de l’Académie Goncourt par sa prédécesseur Edmonde Charles-Roux. Assis face au journaliste, Charles Juliet écoute. Il écoute son éloge, écrit par Tahar Ben Jelloun à l’occasion du Goncourt, et lu par Bernard Pivot. Il écoute les rappels de son œuvre, de ses influences (Beckett, Giacometti). Il écoute la réception de ses « mots économes » et de son « refus d’enjoliver ». Il écoute Paul Valéry :

« Chaque atome de silence
Est la chance d’un fruit mûr ! »

Il écoute enfin le drame de sa vie : retour sur la disparition de sa mère, sur le silence, sur la quête de soi et des origines qui s’ensuivent. Avec émotion, il nous rappelle que nommer, c’est détruire ; que se connaître, c’est se nommer – comme pour justifier l’échec programmé de son entreprise d’élucidation intérieure. Il évoque la « voix silencieuse » qui ne cesse de lui parler lors de ses insomnies, et qui lui dicte souvent ses poèmes. Il revient sur la proximité qui le lie à ses lecteurs, dont il reçoit beaucoup de lettres, de témoignages, voire de confessions.

Comment en effet ne pas se sentir proche d’un poète qui se dissocie de toute performance créatrice, dans un souci de justesse et de vérité ? Nous nous sentons tous des intimes de l’homme sur la scène, parce qu’il nous livre avec générosité et authenticité les tourments et les joies de son être.

C’est ensuite seul que Charles Juliet poursuit l’intervention – Bernard Pivot s’éclipse. Le poète est assis à un bureau, dans un cercle de lumière. Il nous lit avec soin une vingtaine de ses textes choisis pour l’occasion dans l’ensemble de son œuvre, publiée et inédite. Plusieurs notes et poèmes évoquent son enfance, sa mère (« Le Lait de ta mélancolie », Moisson) : l’émotion est grande. D’autres prennent l’écriture elle-même pour objet : il est question des livres qui « agrandissent la vie, poussent à creuser davantage, aident à respirer à pleins poumons » (Lumières d’automne, Journal VI, 1993-1996). La lecture s’achève sur le récit de la quête métaphorique de l’être par l’enfant Charles. À l’évocation de l’« instante adhésion à la vie » (Dans la lumière des saisons, 1991) sur laquelle débouche cette quête, un silence de l’apaisement résonne dans la salle, puis les applaudissements, longs et nombreux.
À lire : les sept volumes du Journal ; Moisson ; Lambeaux.

Justine Granjard

Visuel ©Maison de la Poesie

Démaquillage doux, rapide, nomade
Gustave dort d’Albert Lemant
La Rédaction

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