Théâtre
<em>BLANC</em> Ou la poésie singulière des êtres marginaux et solitaires au Théâtre de la Loge

BLANC Ou la poésie singulière des êtres marginaux et solitaires au Théâtre de la Loge

21 September 2011 | PAR La Rédaction

La Loge donne un triptyque de pièces courtes de l’américain Tennesse Williams, porté à la scène par une jeune équipe talentueuse sortie du Théâtre National de Strasbourg. Un beau projet qui donne authenticité à une écriture plus souvent adaptée au cinéma, où la fragilité des personnages de Williams peut sortir en toute évidence et sans les excès de certaines représentations théâtrales aux dispositifs imposants.

Dans ce cas, c’est plutôt un théâtre intime qui nous fait pénétrer avec douceur et spontanéité dans l’univers de l’auteur. L’atmosphère de la petite salle de la Loge est décontractée et chaleureuse ; la scénographie essentielle et pourtant très efficace : une table, deux chaises, une radio… ; un comédien et une comédienne doués et complices passent avec naturel d’une pièce à l’autre. Chaque détail est rendu avec une simplicité extrêmement étudiée et soignée (les musiques, les costumes..), et grâce à cela les spectateurs se retrouvent soudain catapultés dans une Amérique sudiste et puritaine de la moitié du XX siècle, parmi des personnages qui arrivent à survivre à la violence du quotidien, aux souffrances et aux frustrations dues à leur excessive sensibilité seulement grâce aux fantasmes et au rêve des leurs vies parallèles.

Willie, dans Pièce Condamnée, a assisté à la mort de sa sœur dans d’atroces conditions et réagit en s’inventant un monde dont elle est la star, la reine. Elois, dans la deuxième pièce, Auto-da-fé, est un petit homme qui habite avec sa mère dans une maison empreinte de puritanisme, et qui reste bouleversé à la vue d’une photo obscène. Il s’agit enfin de Lui et d’Elle, dans la dernière et la plus poétique des trois pièces, Parle-moi comme la pluie et laisse-moi écouter, un couple qu’on retrouve au milieu d’une scène tellement habituelle de leur intimité quotidienne qu’elle donne envie à Elle de fuir et de passer le reste de sa vie éloignée de la société, libérée de toutes les contraintes de la vie sociale.

L’écriture de Tennesse Williams, ainsi que sa pitié à l’égard de ces personnages maudits, renforcent le sens de proximité physique et psychique que le lecteur/spectateur sent avec eux (on sent Faulkner, Dostoïevski…).
C’est un théâtre de contrastes, où la cruauté et la noirceur de la société et du monde passent parfois au second plan par rapport à la douceur des illusions des protagonistes, aux fantasmes d’une vie différente, pure et propre (adjectif qui revient plusieurs fois dans les textes). C’est une « blancheur » de vie qui obsède leurs existences, et à laquelle ils croient sincèrement, comme à une possibilité de fuite de leur quotidien, en frôlant souvent une certaine forme de folie.

À voir.

Visuel (c)  Nicolas Marie- Photos de répétition.

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