
Découverte : Le journal d’un disparu de Janacek à l’Athénée
Encore ce soir et ce week-end, le ténor Christophe Crapez vous invite à découvrir un cycle de Lieder du compositeur tchèque Leoš Janácek (1854-1928), qu’il interprète et met en scène comme un opéra aux côtés de la superbe mezzo-soprano Eva Gruber et du pianiste et chef d’orchestre Nicolas Kruger. Une très belle découverte à l’Athénée.
Composé en 1916, à partir de 23 poèmes publiés anonymement dans un quotidien de Brno en dialecte valaque du nord-est de la Moldavie, “Le journal d’un disparu” raconte l’histoire du paysan Jan qui découvre les joies de l’amour avec la tzigane Zefka. Une passion incorrecte à cette époque et qui le poussera à quitter les siens. Lorsque Janácek découvre cette histoire, elle résonne fort en lui, le compositeur de 63 ans connaissant un fol amour avec une jeune-femme de 24 ans sa cadette et mariée… C’est la période la plus créative de Janácek qui crée dans les dernières années de sa vie les opéras “La petite renarde rusée”, “L’affaire Markopoulos” et “de la maison des morts.”
Le résultat est un cycle de Lieder absolument superbe et qui fait fortement penser à la “Belle meunière” (1823) de Schubert. Mais le ténor Christophe Crapez ne l’entend pas tout à fait de cette oreille. Pour lui, que la tzigane Zefka chante avec Jan transforme les poèmes en véritable opéra. C’est pourquoi il faut les mettre en scène. Avec la complicité de l’excellent Giulio Lichner (décors), il a transposé ce cycle champêtre dans un bureau d’administration d’usine tout droit sorti des “Amours d’une blonde” de Milos Formas. Porté par une structure métallique qui semble danser et grincer au rythme du piano de Nicolas Kruger et des vrilles du chœur formé par Séverine Etienne-Maquaire, Sacha Hatala et Ainhoa Zuazua, ce décor offre une entrée en matière à la fois drôle et méditative, avant que Jan (Christophe Crapez) et sa lumineuse Zefka (Eva Gruber) arrivent en scène. Dès lors, les voix prennent toute la place et le décor ne fait plus qu’accompagner les amours interdites.
Une grande œuvre méconnue, interprétée avec talent et passion, à voir très très vite au théâtre de l’Athénée, puisqu’il n’y a plus que trois représentations.