Opéra
Monsieur Jourdain accueille Théotime Langlois de Swarte comme chef d’orchestre

Monsieur Jourdain accueille Théotime Langlois de Swarte comme chef d’orchestre

19 March 2023 | PAR Victoria Okada

Au début, sur le site de l’Opéra-Comique, figurait timidement le nom de Théotime Langlois de Swarte en tant que chef dans le cadre de l’Académie de l’institution. Violoniste en pleine ascension, il devait diriger, pour la reprise du Bourgeois gentilhomme, seulement quelques représentations à la fin de la série. Or, Marc Minkowski, initialement prévu pour diriger la production, s’est blessé au bras. Le jeune apprenti chef est ainsi propulsé sur le devant de la scène… plutôt dans la fosse. Il remplaçait déjà son aîné, à Vichy, les 25 et 26 février derniers. À Paris, c’est lui qui assure la direction de toutes les dix représentations jusqu’au 26 mars.

Monsieur Jourdain enfin à l’Opéra-Comique

En 2020, Marc Minkowski et Thibault Noally devaient être dans la fosse en alternance pour une version comédie-ballet du Bourgeois Gentilhomme de Molière et Lully. Le soir de la première, quelques heures avant la représentation, un cas de COVID fait annuler toutes les représentations. Si la production a tourné par la suite dans de nombreuses villes en France et ailleurs, Paris attendait toujours le retour de Monsieur Jourdain, dans la mise en scène de l’ancien directeur artistique de la maison, Jérôme Deschamps, qui tient également le rôle-titre. Lors de sa première présentation de la saison pour 2023, Louis Langrée, nouveau directeur artistique de la Salle Favart, annonçait avec joie et fierté apparente les débuts de Théotime Langlois de Swarte en tant que chef, « juste pour une ou deux dernières représentations » pour l’œuvre de Molière. Mais la circonstance a joué en sa faveur : le jeune violoniste est en ce moment tous les soirs ou presque dans la fosse de la Salle Favart. Et il tient bien sa place.

Théotime Langlois de Swarte, le chef

Au centre de l’orchestre, sur un podium surélevé, il joue de son violon avec les autres musiciens du pupitre. Quand il lâche son instrument, il dirige avec beaucoup de gestes, souvent amples, énergiques et déterminés. Ses mouvements de bras paraissent quelque peu disproportionnés par rapport à la musique, et il donne toutes les indications à tout le monde. Il offre en quelque sorte un spectacle dans le spectacle et donne l’impression qu’il dirige plutôt un grand orchestre dans une symphonie de Beethoven ou de Mahler… Mais peu importe, il affinera au fil des temps sa technique qui, elle, n’est pas un facteur central dans la musique de cette période — où le chef, dans le sens actuel du terme, n’existait pas. L’important est de savoir comment il mène la partition. Là, il propose des idées, certainement mûries en tenant le violon dans de nombreuses productions et au sein de différents ensembles. Pour un exemple, citons la fameuse Marche pour la cérémonie des Turcs. Son tempo est très retenu et chaque note est bien articulée, parfois à la limite du ridicule, accentuant la fausse majesté de cette farce.
L’orchestre est composé de membres des Musiciens du Louvre et des élèves de l’Académie des Musiciens du Louvre, en partenariat avec le Jeune Orchestre de l’Abbaye et le CRR de Paris. Le fait qu’un certain nombre de musiciens sont de la même génération que le chef créé certainement des émules dont il résulte un beau rendu.

Spectacle déjà daté

Contrairement à la partie orchestrale plaisante, le spectacle lui-même semble déjà daté, voir fatigué. Dans la mise en scène, tout l’espace n’est pas optimisé et on se demande pourquoi des chansons à boire et certaines autres scènes se passent « à l’étage »… La présence des objets modernes fait partie des gags mais à notre sens, ils ne trouvent pas leurs légitimités dans cette conception qui reste finalement très classique. Et dans tout cela, il y a trop de « déjà-vu », des éléments empruntés par ci, par là. Un « déjà-vu » peut être inventif selon les angles sous lesquels les scènes sont abordées, mais ici, le rire sonne dans le vide et ne retient pas l’attention.

Distribution hétérogène

Parmi les acteurs, Vincent Debost (Coville et le Maître d’armes), Guillaume Laloux (Dorante et le Maître de danse) et Jean-Claude Bolle Reddat (le Maître de philosophie) caractérisent leurs rôles à cœur joie. Quant aux chanteurs (en double ou triple distribution selon les rôles), ils sont extrêmement hétérogènes et la différence de niveaux est plus que flagrante. Ce soir-là, Sandrine Buendia et Jérome Varnier sortent incontestablement du lot tant pour la voix que pour l’articulation et la prosodie.

Cette représentation nous a laissé une grande réserve sur le plan scénique, avec une forte impression de déjà-vu. La distribution hétérogène provoque un sentiment de non-aboutissement. En revanche, Théotime Langlois de Swarte apporte la fraîcheur à la musique, laissant présager sa deuxième carrière qui se développera au moment venu.

visuel © Stefan Brion 

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