Danse
Fantasma, une création Savary & Zaffuto aux Folies Bergère

Fantasma, une création Savary & Zaffuto aux Folies Bergère

17 November 2022 | PAR Nicolas Villodre

Au moment où Polnareff aguiche et s’affiche en re-dévoilant son arrière-train en France et en Navarre, où Myriam Szabo refait le coup d’enlever le haut, avec Fantasma, Circus Erotica, Manon Savary et Marc Zaffuto nous ont offert en primeur, aux Folies Bergère, une idée du spectacle qu’ils préparent pour le Venetian, un des plus grands hôtels-casinos de Las Vegas.

Burlesque

Le mot “circus” du sous-titre de la pièce rappelle naturellement le Grand Magic Circus et ses animaux tristes, avatar du Grand Panic Circus, créé en 1966 par Jacques Coutureau et Jérôme Savary (1942-2013), le père de Manon – sa mère, Mona, étant une des vedettes de cette troupe. Autant dire que Manon est une enfant de la balle, rompue à la mise en scène théâtrale, aux tournées les plus reculées, aux shows métissant diverses disciplines artistiques : musiques, chansons et danses, autant que possible érotiques. C’est ici le cas, avec, en lieu et place des “animaux tristes”, des créatures au genre indéterminé, repoussant les limites du bon goût, des canons esthétiques et érotiques.

Chez les Savary, de père et mère en fille(s), le sexy et le burlesque font partie des gènes. Le burlesque à l’ancienne est ici préservé, avec ses “bons mots”, ses sous-entendus, ses doubles sens (malheureusement délivrés par la maîtresse de cérémonie, Allanah Starr, qui se la joue Mae West, en amerloque, sans sous-titres). Le “nouveau” burlesque itou, avec une science du striptease maîtrisée à la perfection par le partenaire de jeu de Manon, Marc Zaffuto, affûté, si l’on peut dire, quant à lui dans la nuit, le milieu gai et gay du clubbing, de lieux parisiens eux aussi historiques comme le Boy, les Bains douches, le Palace et le Queen. Le duo artistique Savary & Zaffuto s’est constitué au Manko Cabaret, scène underground, située au sous-sol du Théâtre des Champs-Élysées où eut lieu le légendaire striptease de Bronia Perlmutter et Marcel Duchamp à l’occasion de Cinésketch.

Cabaret

Fantasma, fantasme au sens freudien du terme, et fantôme au sens où pouvait l’entendre le sourd d’une oreille Luis Buñuel, c’est-à-dire celui de la liberté, en mélangeant les genres, en créant un tout nouveau, qu’il s’agit, maintenant, de travailler, de développer, de fignoler avant de traverser l’Atlantique. On n’est plus ici ni dans le “new burlesque” ni dans un post-burlesque indifférencié, mais plutôt dans un trans-burlesque, qui irait d’Anita Berber à Klaus Nomi et passerait de Candy Darling à Divine. Sans oublier, bien sûr, les stars et starlettes d’un Voguing toujours en vogue, de toute évidence. 

Plus besoin aujourd’hui, qu’on soit homme ou femme, de risquer l’entorse en talons aiguilles si l’on vise à éveiller les sens. Les chaussures plateforme jadis réservées aux drags se commandent à La Redoute et sont portées en ville par le commun des mortels. Les tenues affriolantes créées par Angèle Micaux pour ce show valent à elles seules le déplacement, les éclairages de Pascal Noël le font, et complètent la scénographie vidéo de Clément Dezelus. Si le cabaret manque encore de numéros de haute voltige, celui de Julie Demont au cerceau est sensationnel. Le stand-up nous épate moins, étant plus sensible au visuel qu’aux beaux discours. À cet égard, le numéro de Jean-Biche, chanté, joué, auto-filmé live et en plan-séquence noir et blanc, sur le tune “I want you”, clôt en beauté le débat.

Visuel : © Pré-show de Fantasma dans le foyer des Folies Bergère, photo Nicolas Villodre.

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