Spectacles
Combats, un spectacle itinérant d’Adrien Béal et Nicolas Doutey

Combats, un spectacle itinérant d’Adrien Béal et Nicolas Doutey

02 December 2022 | PAR Gautier Higelin

Au théâtre de Gennevilliers se déroulait l’avant-première de Combats, une pièce commandée par le TNS, le théâtre des 13 Vents et le T2G. Ce partenariat impose deux règles : le spectacle doit pouvoir être installé partout et la distribution doit être composée de comédien.ne.s ayant participé au programme Ier Acte .

Puisque le spectacle doit pouvoir être joué n’importe où, la mise en scène est minimaliste. Les effets sonores ou lumineux disparaissent au profit de deux bancs, un meuble et des tatamis de judo.  Dès l’arrivée du public dans la salle, Jo et Al, les deux personnages principaux, sont présents dans la salle.  

Le jeu comme mise en mouvement de soi

Si le texte, écrit par Nicolas Doutey, oscille entre questionnements personnels et regard sur soi, il est également drôle par son aspect décalé sur les scènes du quotidien et de l’intime.

En effet, Jo ne cesse de ressasser à son cousin Al qu’elle n’a pas « envie de faire ce qu’elle doit faire ». L’objet de ce qui doit être réalisé ne sera jamais communiqué car là n’est pas la question. Elle tourbillonne sur la scène en cherchant, en vain, une raison de se mettre à agir. Elle établit dans le même temps un discours sur elle-même, en extériorisant cette petite voix intérieure qui exprime nos questionnements, nos incohérences, nos angoisses.

Par la proposition de jeu de Al, Jo arrêtera sa logorrhée intérieure. Dans son rôle d’acteur qui vit l’instant présent, Al débloque Jo en lui proposant de jouer à ce qu’on appelle communément le bras de fer chinois.

Sa porte de sortie réside simplement par sa mise en mouvement dans une activité cadrée, qui comporte des règles et qui a un objectif : gagner en écrasant le pouce de l’autre.Une méthode qui permet de rompre avec un discours autophage sur le sens de la vie.

« Il faut jouer pour le jeu »

Jo se sent désormais vivante. Elle se laisse absorber par tous les aspects du jeu. On y retrouve également l’excès, la compétition et l’addiction. Si celui-ci s’apparentait d’abord comme un aparté dans le quotidien, il en devient de plus en plus central.

De la même manière, avec l’arrivée de Nina, Al veut régler le « ton » de sa relation avec celle-ci. Et c’est par le jeu qu’il arrivera à transformer l’état de la situation et à trouver les mots justes pour lui transmettre son ressenti.

Le fait de jouer incarne un rapport vital à l’action, à la mobilité. Pour jouer, il faut « rentrer dedans ». Impossible d’adopter un regard extérieur sur ce qui est en train de se passer sinon le jeu perd de son essence. En l’occurrence, le jeu du pouce paraîtrait idiot de l’extérieur. La maxime d’Al devient alors « il faut jouer sans jeu ». Cette approche rend capable de sentir les choses et d’espérer, a posteriori, d’être autre chose.

Un minimalisme scénique qui laisse place au texte

Combats est une pièce qui met au centre l’écriture. Une écriture mobile qui s’accentue au fil du temps et qui fait vivre la pièce. Le texte est organique, intense jusqu’à devenir bouillonnant. Pour raconter nos « combats » intérieurs et relationnels, il ne prend pas, chez les comédien.ne.s, un rôle narratif. Il incarne le verbe et l’action par son langage.

Les contraintes humaines, spatiales et matérielles imposées par la commande font alors jaillir une liberté certaine. Une liberté de l’instant, de l’expérimentation,  qui se creuse au sein même des relations humaines, refusant ainsi d’emprunter tout chemin menant à une transcendance quelconque.

 La pièce mise en scène par Adrien Béal a tous les attributs pour partir en itinérance…  

 

Visuel : ©Jean-Louis Fernandez

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