Le verbe délicat du duo Dominique A et Bertrand Belin déconfine le studio 104
En soutien au festival Fnac Live Paris qui n’a pas pu avoir lieu cette année, France Inter a proposé en lieu et place une semaine de programmation spéciale (du 29 Juin au 3 Juillet 2020) avec en point d’orgue une création exceptionnelle en direct et en public de Dominique A et Bertrand Belin qui devaient se produire cette année au Fnac Live, suivi d’un concert de Malik Djoudi.
Quel point commun entre le dandy nonchalant du rock français et l’ex chantre du murmure, j’ai nommé Bertrand Belin et Dominique A? Une certaine mélancolie, peut être ? Une voix/voie singulière? Une exigence sans doute. C’est en tout cas à une création originale, mêlée à d’émouvantes retrouvailles que nous convient les deux complices, qui avaient déjà rodé leur duo à Poitiers dans le cadre d’une soirée spéciale de leur label Cinq7. La règle de ce set d’une heure étant que chacun emprunte dans le répertoire de l’autre, trouvaille originale qui permet de faire se rencontrer leurs deux univers, dans une ambiance intimiste, la salle n’étant rempli qu’au tiers de ses capacités, mesures sanitaires oblige.
Accompagnés du seul claviériste Thibaut Frisoni, de leurs guitares, et d’une boîte à rythme, les deux chanteurs entament par Je suis une ville de Dominique A, qui évoque les stigmates d’un lieu qui semble vidé de ses habitants, hanté par des fantômes, des laissés-pour-compte, et où rôde la mort. Une ville qui pourrait être celle de nos confinements. Le ton est en tout cas donné. Suivront l’envoûtant Hypernuit de Bertrand Belin, où les voix se mêlent dans de belles envolées lyriques et Le bruit blanc de l’été de Dominique A, élégant opus réunissant inquiétude lancinante et rythmes électro.
Mais le grand moment de cette soirée, semble être la reprise de l’hypnotique et impudique Pour la peau, de Dominique A que Bertrand Belin s’approprie de manière bouleversante et tragique. Il dira d’ailleurs à quel point ce morceau l’a toujours touché et le trouble. Au point qu’on ne sait plus très bien qui, de Bertrand Belin et Dominique A, a écrit ou chante sur scène. Au fil des morceaux, chacun semble initier une danse et une communion avec son alter ego. Un moment suspendu, délicat et rare.
La soirée se termine avec une reprise d’un magnifique morceau de Gérard Manset Lumières, qualifié de liturgie païenne par Bertrand Belin, souvenir lancinant d’une époque révolue, d’une lueur qui brillait dans la nuit.
Mais où sont passées les lumières
Qui nous guidaient ?
Devenus statues de pierre,
Qu’avons nous fait ?
Les instants, comme des clous de fer
Qu’on enfonce
Et rien que le bruit de la mer
Pour seule réponse.
Le set sera dédié à Benoît Brayer, le créateur du Festival Fnac Live, décédé en Février dernier d’un cancer.
Le concert de Bertrand Belin et Dominique A, suivi de celui de Malik Djoudi est disponible en replay sur le site de France Inter.
Le 6ème album de Bertrand Belin : Persona est toujours disponible. Il a fait l’objet d’une réédition tout récemment, avec des titres inédits, dont un duo avec Barbara Carlotti. Bertrand Belin entamera bientôt une nouvelle tournée inédite, accompagné par l’ensemble des Percussions Claviers de Lyon. Il sera le 8 Décembre 2020 à Paris Centquatre.
Dominique A sort ce vendredi 03 Juillet un nouveau titre, Papiers Froissés, extrait de son nouvel EP Le silence ou tout comme, qui sortira le 10 juillet. Pendant le confinement, il a également sorti une reprise du titre L’éclaircie, chanson emblématique du groupe Marc Seberg, emmené par le charismatique Philippe Pascal (chanteur du groupe Marquis de Sade).
Photos : @ A. Pequin – TAP Théâtre Auditorium de Poitiers
@ M. Hartmann / bandits vision