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Nicolas Viccaro : « Quand je joue, je me sens libre » – Interview

Nicolas Viccaro : « Quand je joue, je me sens libre » – Interview

31 July 2023 | PAR Geraldine Elbaz

Batteur du Groupe NEC+ et musicien très recherché au sein de nombreuses formations, Nicolas Viccaro est à lui seul un spectacle sonore et visuel ! Arborant fièrement ses baguettes vert fluo, il parcourt le monde et offre un spectacle mémorable à chaque concert. Il a joué aux côtés de grands noms tels que John McLaughlin, Bill Evans, Hans Zimmer, Biréli Lagrène, Etienne Mbappé, Richard Bona pour n’en citer que quelques uns. Cette année, il se lance en tant que leader et présente son premier single intitulé « Metropolitan Souk ». Entretien avec un musicien de talent qui n’a pas fini de faire parler de lui.

Pourriez-vous nous parler brièvement de votre parcours musical ?

Je suis né en 1986 et j’ai été initié à la batterie dès l’âge de 3 ans par mon père, lui-même batteur professionnel. Ma chambre était située à côté de son local de répétitions, ainsi j’ai été exposé très tôt à cet univers musical. J’ai reçu un kit de batterie dans ma chambre vers l’âge de 2 ans. Initialement, je jouais décroisé, ce qui est en réalité plus naturel, mais après avoir observé d’autres batteurs, j’ai adopté la technique croisée. Mon père ne m’a jamais réellement donné de cours, je l’accompagnais souvent lors de ses prestations, et j’ai développé une approche autodidacte. Mon apprentissage se faisait principalement en jouant sur des disques. Contrairement à certains musiciens, j’ai toujours préféré travailler à l’oreille plutôt qu’à partir de partitions, c’est la méthode qui m’a permis de progresser plus rapidement.

Quelles sont vos principales sources d’inspiration musicales ?

La première source d’inspiration a été mon père, qui m’a transmis sa passion pour la musique ainsi que toute sa culture musicale. Il avait également une approche autodidacte. Sur ses conseils, j’ai rejoint le conservatoire de Nice pour étudier auprès de Jean-Paul Ceccarelli, frère d’André Ceccarelli. Cette expérience a été déterminante pour mon développement musical, notamment dans le domaine du jazz. Avant cela, j’étais davantage attiré par le pop-rock, avec des artistes tels que Toto, Phil Collins et Queen. Mon intérêt s’est progressivement orienté vers le jazz-rock.

Parlons de vos baguettes vertes. Y a-t-il une signification particulière derrière ce choix ?

Le choix des baguettes vertes est en réalité le fruit du hasard. Récemment, j’ai été nommé artiste international Yamaha, et je suis également sponsorisé par d’autres grandes marques telles que Remo pour les peaux de batterie et Zildjian pour les cymbales, qui constituent l’élément le plus personnel de mon équipement, tout comme les baguettes. Lorsque j’ai dû choisir le modèle de baguettes qui me convenait le mieux, j’ai opté pour les vertes (plutôt que les roses). Suite à cela, lors de ma participation à une émission de grande audience, The Voice, aux côtés de Véronique Sanson, tout le monde a remarqué mes baguettes. Cela a contribué à leur popularité en France, où les baguettes vertes semblent désormais être les plus populaires.

Vous avez parcouru le monde en donnant des concerts au sein de différentes formations (NEC+, les Prophètes, Richard Bona, John McLaughlin, etc.) et joué avec de nombreux artistes prestigieux. Y a-t-il un musicien avec qui vous rêveriez encore de collaborer ?

Je vais peut-être me permettre d’être un peu présomptueux en disant cela, mais j’aimerais beaucoup jouer avec Sting. Vinnie Colaiuta, l’un de mes batteurs préférés, a longtemps joué avec lui, il a également collaboré avec Herbie Hancock, Chick Corea ou encore Jeff Beck. Récemment, j’ai eu l’occasion de jouer avec Dominic Miller, le guitariste et bras droit de Sting… L’opportunité se rapproche peut-être ? Sting incarne vraiment une partie essentielle de mon enfance et de mon évolution musicale.

Pourriez-vous nous parler de vos projets avec Etienne Mbappé ?

J’ai fait la rencontre d’Etienne Mbappé pour la première fois lors d’une jam à Nice lors du Festival de Jazz. Je me souviens très peu de ce moment tellement le stress était présent, mais visiblement, cela s’est bien passé. Il m’a demandé si je me rendais parfois à Paris, ce qui n’était pas le cas à l’époque. Il m’a invité à participer à des jams à Paris, et nous nous sommes recroisés à plusieurs reprises, il se souvenait de moi. Quelques mois après, il m’a appelé pour monter un projet avec un quatuor à cordes pendant l’été au  mythique jazz club Le Baiser Salé. J’avais alors 18 ans, et en juillet 2007, j’ai eu l’opportunité de jouer officiellement avec lui pour la première fois. Nous avons travaillé ensemble sur un projet de chansons, et depuis lors, nous ne nous sommes plus quittés.

Pourriez-vous nous raconter une anecdote que vous n’avez racontée à personne ? 

Les souvenirs qui me marquent le plus sont souvent liés à mon enfance. Une expérience particulièrement marquante a été de jouer avec Dave Stewart (Eurythmics) lors des Jeux Olympiques de Londres en 2012. Nous avons interprété « Sweet Dreams », ça fait quelque chose de jouer un morceau aussi connu avec devant, le compositeur qui partage cet instant avec vous. 

Vous allez bientôt commencer une nouvelle étape de votre carrière en tant qu’enseignant en Suisse. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet ?

Effectivement, l’enseignement marque un nouveau tournant dans ma vie de musicien. C’est quelque chose que je n’avais pas envisagé immédiatement, peut-être plus tard. L’opportunité s’est présentée de manière très favorable en Suisse, à la Haute Ecole de Musique de Lausanne, une école moderne ouverte à de multiples perspectives. Je vais y occuper le poste de Maître d’Enseignement de Batterie Jazz, une perspective très intéressante. Les étudiants de cette école sont désireux de faire des recherches et d’explorer divers horizons, ce qui me passionne particulièrement. De plus, en tant que jeune père, cette nouvelle fonction s’accorde parfaitement avec ma vie personnelle. J’ai hâte de commencer cette nouvelle aventure.

Selon vous, quelle réaction votre musique devrait-elle susciter chez vos auditeurs ?

Le summum serait que le public ressente la même chose que moi lorsque je joue. Souvent, à la fin des concerts, le public nous remercie chaleureusement, mais je tiens avant tout à remercier les auditeurs d’être présents pour recevoir ce que nous avons à donner.

Comment décririez-vous votre relation avec la liberté au sein de votre musique ?

Dans le jazz, la liberté et l’improvisation demandent des heures et des heures de travail et de répétitions. C’est un processus de “re-répétition”, de répétition intensive, qui permet ensuite d’exprimer des choses de manière naturelle. Sans un travail préalable, on ne peut pas se permettre de prendre des risques et de proposer des choses inconnues. Toutefois, il arrive parfois que des moments magiques et inexplicables se produisent lors de l’interaction avec les autres musiciens, permettant ainsi l’expression d’émotions intérieures et cachées, comme par exemple avec Etienne Mbappé ou Christophe Cravero au sein de notre trio NEC+.  Quand je joue, je me sens libre, car j’ai eu la chance d’avoir la motivation de travailler intensément pour acquérir cette liberté et ce recul nécessaires. L’écoute périphérique joue un rôle crucial, car il faut s’oublier pour atteindre un niveau d’automatisme élevé.

Quels sont vos projets pour cette année ?

Je sors un nouveau single « Metropolitan Souk » le 1er Août. « Metropolitan » c’est la vie de la ville que j’adore surtout la nuit, cette effervescence que l’on peut retrouver à Paris, à New-York ou dans d’autres grandes capitales… « Souk », c’est le voyage, un magma d’influences multiples. Et l’on retrouve tout cela dans le morceau. Il y a des percussions africaines jouées par un immense percussionniste brésilien, qui s’appelle Adriano DD Tenorio. J’ai la chance d’avoir des invités d’exception comme Anatole Muster à l’accordéon, à la basse, il y a Hadrien Feraud, un ami parisien qui vit à Los Angeles.  Il y a aussi Ruslan Sirota, un pianiste israélien qui lui aussi est à Los Angeles, et Olivier Louvel aux guitares, Oud et Saz.

Visuel : (c) pochette single_Mathilde Leclerc

Interview de Nicolas Viccaro

Metropolitan Souk

Sortie le 1er août 2023

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Geraldine Elbaz
Passionnée de théâtre, de musique et de littérature, cinéphile aussi, Géraldine Elbaz est curieuse, enthousiaste et parfois… critique.

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