Hysteria Temple Foundation : quand la techno rencontre le rap ukranien
Ce sont des artistes importants de la scène des musiques électroniques en France. D’un côté, Paul Ritch, dont les titres depuis quinze ans, classés parfois dans le registre minimal, ont fait le bonheur de labels prestigieux comme Drumcode, SCI+TEC, Saved, Cocoon, Soma, Bpitch Control et Quartz Rec.
Ses prestations en live sont par ailleurs en haut de l’affiche dans les clubs et festivals du monde entier. De l’autre, Kmyle, apparu plus récemment, en solo ou au sein du groupe Mod3rn de son ami Electric Rescue sur son label Skryptom (avec qui il forme en outre le duo Laval). Le Toulousain a su séduire rapidement le public et les critiques par des morceaux techno de solide facture comme « Empathy » ou « Paris ». Jouer sur scène avec Laurent Garnier n’a pas non plus effrayé un producteur impressionnant de maturité.
Leur réunion a abouti non seulement à des collaborations assez classiques (à l’instar de l’entêtant « Revolt ») mais aussi à la naissance d’un label l’an passé (Hysteria Temple Foundation), où leur volonté commune est d’apporter un son tribal et sombre, qui n’oublie pas la profondeur des textures et l’harmonie des fusions, entre techno, ambient et bass music.
Leur premier morceau intitulé « Athrahasis » a été réalisé en collaboration avec Gabriella Vergilov, productrice et dj bulgare. Leur deuxième opus coïncide avec leur première prestation live commune au festival toulousain Electro Alternativ. S’ils jouent à visage découvert, le but n’est pas de se mettre en avant, plutôt d’installer un univers visuel (qui part déjà d’un logo spécifique) et d’un climat sonore dont l’actualité prend une dimension particulière.
Car « Ritual », qui sort cette semaine, met en valeur la voix d’Alina Pash, rappeuse ukrainienne qui a commencé sa carrière en 2018 avec son label Bitanga Blood et s’est fait connaître du grand public en étant sélectionnée pour le concours Eurovision (avec le titre Shadows of Forgotten Ancestors), compétition dont elle s’est retirée en février. La raison ? De vives réaction sur les réseaux sociaux lié au fait qu’elle aurait voyagé en Crimée en transitant par la Russie en 2015, ce qui est interdit par le gouvernement ukrainien depuis l’annexion de la Crimée par la Russie. L’actualité, depuis, a rendu le sujet encore plus sensible évidemment.
Quoi qu’il soit, ce qui compte avant tout, c’est bien la musique et la création de ce trio, extrêmement intéressante, sensible et innovante, à la croisée de personnalités et d’univers qui se complètent à merveille. Osant sortir des sentiers battus et de leur zone de confort. Et, nouvelle importante, l’intégralité des revenus de cette sortie seront reversés à la Croix-Rouge française.
Rodolphe Peté