[Chronique] Lisa Batiashvili : Bach aérien et brillant
Loin d’être un album solo c’est un album de musique de chambre que nous présente ici Lisa Batiashvili. Accompagnée de François Leleux, d’Emmanuel Pahud, de Sebastian Kinger et de Peter Koller, Orchestre symphonique de Bavière, elle revisite Bach.
C’est un album ou règne une collégialité qu’il fait bon d’entendre. Lisa Batiashvili et ses comparses revisitent le répertoire de Bach avec fraicheur, légèreté, finesse et souplesse. Bien qu’il s’agisse de l’opus d’une violoniste, l’instrument roi des salles de concert, n’est pas tant ici au centre de l’attention, bien au contraire. En effet, c’est le répertoire qui prime, Bach père et fils – puisqu’il y est interprété une œuvre de Carl Philipp Emanuel – qui sous les doigts de ces musiciens brille, scintille et rayonne avec justesse et humilité.
Ainsi, dans le Double Concerto pour violon, hautbois, cordes et continuo en Ut majeur BWV 1060 de Jean-Sebastien comme dans la Sonate en trio pour flûte, violon, violoncelle et continuo en Si mineur Wq 14 de Carl Philippe Emmanuel, on est porté par la fluidité des échanges de paroles. Le double concerto est de ce fait profondément aérien, le hautbois de François Leleux y brille et resplendit. Un large éventail de couleurs se dégage de l’interprétation, de la douce et contrastée liesse du premier mouvement, de la tendresse et du moelleux du second, au piquant et pointilleux de l’Allegro. Tout n’est que souffle revigorant, tout respire, tout coule de source. L’harmonie des musiciens ressort particulièrement au deuxième mouvement où hautbois et violon avancent avec les mêmes intentions, comme si chacun marchait dans les pas de l’autre.
Une entente remarquable que l’on retrouve dans l’œuvre de Carl Philippe Emanuel, où cette fois Lisa Batiashvili s’associe au flûtiste Emmanuel Pahud. Là encore, aisance et grâce sont reines, les timbres s’entremêlent et l’on semble même se conter fleurette au premier mouvement. On apprécie particulièrement la couleur feutrée et chaleureuse de la flûte, que l’Adagio vient faire ressortir. L’Allegro final est du même acabit, délice de fugacité magnifié par un relais parfait des phrases musicales.
Quant aux deux œuvres pour cordes, Le Concerto pour violon, cordes et continuo en Mi Majeur BWV 1042 et la Sonate n°2 pour violon en La mineur BWV 1003, on y voit s’exalter les contrastes caractériels. Ainsi l’Allegro est facétieusement martial, et Lisa Batiashvili danse et s’amuse des redoutables dentelles de notes. Une facilité que l’on retrouve évidemment dans l’Allegro Assai final où à travers les arabesques sinueuses et joyeusement faciles soufflent la liberté. L’Adagio, est d’une mélancolie bouleversante, tout en rondeur, la douleur y est accrue par la finesse et la sensibilité des nuances. Mais la sensibilité, l’émotion de ce concerto n’est rien comparé à ce que l’on ressent à l’écoute de la sonate où le trouble surgit et vous prend irrémédiablement. Simplicité et solennité de l’interprétation, exactitude du discours et pourtant richesse de couleurs, sont les mots qui résument le jeu de Lisa Batiashvili dans cette sonate. Des éléments que l’on retrouve dans le petit bonus final de l’album, un somptueux Erbame dich, mein Gott aria extraite de la Passion selon Saint-Matthieu. Un bel et riche opus que l’on écoute avec un plaisir immodéré.
Lisa Batiashvili, Bach, sortie chez Deutshe Grammophon le 15 septembre.
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2 thoughts on “[Chronique] Lisa Batiashvili : Bach aérien et brillant”
Commentaire(s)
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Bertrand CAZENEUVE
Le double concerto pour violon et Hautbois n’est pas en Mi Majeur mais bel et bien en ut mineur, foi d’Hautboïste…
Bertrand CAZENEUVE
De plus ce concerto pour Violon et Hautbois porte le BWV 1060. le BWV 1042 est le Concerto en Mi Majeur pour Violon.