
“LA CHASSE AU TRÉSOR” d’ Andrea CAMILLERI, vaudeville à l’italienne.
Faut-il présenter Andrea Camilleri le sicilien qui donne autant de fil à retordre aux traducteurs qui veulent préserver la musique de ses romans? Il connaît un énorme succès en Italie comme ailleurs, notamment grâce à ses polars mettant en scène le commissaire Montalbano. Depuis maintenant des années, les enquêtes du sarcastique commissaire, qui n’abandonnent jamais les situations et les atmosphères siciliennes, ainsi que le langage italo-sicilien sans concession aux motivations commerciales ou à un style d’écriture plus facile à lire, fascinent des milliers de lecteurs.
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Collectionneurs de croix et fervents dévots, Gregorio Palmisano et sa sœur Caterina se prennent subitement pour le bras vengeur de Dieu. Pour punir les pêcheurs de Vigàta, ils leur tirent dessus depuis leur balcon. N’écoutant que son courage, Montalbano monte à l’assaut et neutralise les fanatiques. Religion et perversion faisant parfois bon ménage, le commissaire découvre que Gregorio partageait sa couche avec une poupée gonflable décatie et rafistolée. Une anecdote sordide dont la presse fait ses choux gras, mais bientôt pour Montalbano un sujet d’interrogation méritant investigation. Car un meurtre est signalé, le corps a été jeté dans une poubelle. Il s’agit en fait d’une seconde poupée, en tous points semblable à la première… S’agit-il de l’œuvre d’un copycat particulièrement tordu, s’en prenant à d’innocentes baudruches de plastique ? Une enquête équivoque débute, qui tourne au bras de fer intellectuel quand un mystérieux épistolier convoque Montalbano à une chasse au trésor…
Montalbano est de retour dans une traduction dont la préface nous permet de mieux comprendre les choix linguistiques du traducteur Serge Quadruppani confronté à la difficulté de l’utilisation du langage courant italo-sicilien. Pour les lecteurs dont c’est le premier Camilleri cela peut être déroutant et représenter un motif d’abandon au bord de la table de nuit… Mais, comme l’auteur, le lecteur doit être obstiné, car une fois que vous avez pénétré dans cet univers, le roman se dévore avec boulimie. Humour, ironie, et sarcasmes, composent ce roman intelligent, vaudeville à l’italienne totalement désopilant, plein de bons mots et de réflexions aux odeurs méditerranéennes.
“LA CHASSE AU TRÉSOR” d’ Andrea CAMILLERI, traduction de Serge Quadruppani, 304 pages, 20 euros, janvier 2015, Fleuve éditions.