
“Légende d’un dormeur éveillé” de Gaëlle Nohant : fabuleux Robert Desnos
Aux Editions Héloïse d’Ormesson, l’autrice Gaëlle Nohant tient son lectorat en grande haleine avec son tout nouveau livre, un roman biographique qui conte la vie fabuleusement romanesque du poète Robert Desnos. Intitulé Légende d’un dormeur éveillé, c’est un livre bouleversant qu’on referme le cœur serré.
[rating=5]
Surréaliste un jour
A Paris, dans les années 20. André Breton, avec poigne et assurance, mène à la baguette le mouvement surréaliste en organisant réunions et conférences dont il décide des participants. Au bout de la table, Robert Desnos, titi parisien et poète, aussi insolent qu’il est intelligent, est épris de liberté et d’amour. Bientôt, il quitte les surréalistes, mais le restera toujours. Amant d’une chanteuse, il s’éprend de la maîtresse d’un autre. Elle s’appelle Youki, et il ne le sait pas encore, mais elle demeurera, à jamais, son oiseau de nuit, sa sirène à lui.
Paris donc, ses fêtes trop arrosées, ses poèmes du soir sur un coin de table, les matins sans le sou. Mais l’amour, toujours, Robert Desnos a eu charisme fou, une plume à tomber, des amis à tire larigot. A sa table, Aragon, Prévert, Picasso, Man Ray, Eluard, Antonin Artaud, et bien sûr, Jean-Louis Barrault, fidèle parmi les fidèles, meilleur ami et partenaire d’intelligence et de poésie. Il aura également la chance de croiser les pas de Pablo Neruda, de Garcia Lorca avant que la révolution espagnole ne l’assassine.
Robert Desnos écrit comme il respire et Gaëlle Nohant, dans ce roman qui mêle, c’est évident, fictions et réalités, souffle souvent ses mots à lui, sa poésie et sa magie avec une fluidité déconcertante.
Héros de guerre
Photographie d’un personnage, d’un mouvement, d’une ville Légende d’un dormeur éveillé est aussi, et surtout, la photographie d’une époque. Quand la Grande Guerre est déclarée, le lecteur est emporté dans le tourbillon de l’horreur, de la famine, du froid et de la peur. Robert Desnos, en éternel révolutionnaire, ne peut se résoudre au silence, à l’impuissance. Il entre en Résistance, et ses emportements trop fréquents auront raison de lui. En 1944, le poète est déporté. A Auschwitz d’abord, puis Buchenwald, et Flöha. La description, écrite tel un journal qu’aurait tenu sa compagne, est parfois insoutenable. La gorge nouée de la dure réalité, on se surprend à espérer un retour en arrière, une histoire réécrite.
On parcourt avec beaucoup d’émotion les derniers instants de cet homme auquel on s’est affreusement attaché. On referme le livre de Gaëlle Nohant avec l’envie dévorante de trinquer à sa santé, de partager une cigarette avec Youki et d’échanger un regard attendri avec Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud. Un très beau livre, d’une précision manifeste, et à l’émotion certaine.
Gaëlle Nohant, Légende d’un dormeur éveillé, Editions Héloïse d’Ormesson, 544 pages, 23€.
Visuel : © DR
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Commentaire(s)
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Henri-Charles Dahlem
Superbe chronique pour un tout aussi superbe roman. Je partage l’enthousiasme et la note de Marine Stisi!
https://collectiondelivres.wordpress.com/2017/08/19/legende-dun-dormeur-eveille/