Dans l’ombre de la lumière : la face cachée d’un saint homme
Rarement un récit apocryphe aura été aussi émouvant. L’on touche ici à l’intimité d’un grand homme de l’histoire chrétienne. Dans ce roman mi-fictif et mi-historique, Claude Pujade-Renaud nous livre un récit touchant sur Saint Augustin, du point de vue d’une des femmes les plus proches de son existence : Elissa, celle qui partagea sa vie pendant près de quinze ans.
Si la vie de saint Augustin (354-430) a été racontée à maintes reprises par des commentateurs, le roman Dans l’ombre de la lumière de Claude Pujade-Renaud nous dévoile une autre facette, plus intime, de l’évêque paléochrétien. Le récit est un aller-retour permanent entre le passé de l’homme sensuel et fou amoureux de sa compagne et le présent de l’homme d’Eglise en constante recherche de sa vérité sur le Salut et la Grâce divine, au travers des yeux d’Elissa, son ancienne concubine. Celle qui lui donna un fils Adéodat (mort jeune) et qui s’est vue répudiée peu avant l’entrée en religion d’Augustinus alors que sa mère Monique l’incitait à faire un riche mariage. Cette femme discrète, bien que très lucide et parfois emportée, a toujours conservé son admiration à celui qu’elle a tant aimé. Bien qu’elle ait tout perdu, Elissa reste fière et jette un regard nostalgique sur ses années de bonheur. Grâce à cette narratrice d’un autre temps, on suit le long cheminement du père de l’Église dont on voit les fragilités et les indécisions, la dure vie d’une femme seule de modeste condition dans une ville de l’Empire romain chancelant.
Il ne faut pourtant pas oublier qu’il s’agit d’un roman. On ne sait presque rien de la narratrice, même pas son véritable nom et nul ne sait ce qui est réellement advenu d’elle après sa séparation. Si son existence est avérée, elle n’est qu’a peine évoquée dans les Confessions de saint Augustin qui renie l’amour charnel et la sensualité. Les faits historiques qui servent de toile de fond sont eux totalement vrais.
Le dernier roman de Claude Pujade-Renaud, loin d’être sans intérêt historique, est avant tout enlevé et alerte sur le temps passé, la déchéance et la grâce. Les chapitres très courts influent un rythme plaisant et prenant qui nous captive. Cette histoire douce amère sur la vie d’un saint reste longtemps présente dans la mémoire.
Visuel : couverture du livre