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Critique de Suite(s) impériale(s) de Bret Easton Ellis

20 September 2010 | PAR Coline Crance

Suite(s) impériale(s) est le dernier roman de Bret Easton Ellis. Il est la suite de son premier roman phare qui choqua l’Amérique , Moins que zéro. Ces personnages, Clay, Blair , Rip, Julian , ont bien vieilli mais ont-ils muri pour autant ? L’heure, pour eux, est au Jugement dernier…. Édition : Robert Laffont 19 euros

 Retour vers la côte ouest pour Bret Easton Ellis . Celui qui commençait vingt cinq ans auparavant son roman par cette citation de Led Zeppeling «  J’ai toujours un sentiment quand je regarde vers l’ouest », plonge une nouvelle fois ces personnages dans ce Los Angeles débridé et décadent où seuls l’apparence et l’artifice priment. Mais depuis vingt cinq ans,  la coke a coulé sous les ponts. Et Bret Easton Ellis semble avoir perdu ce regard cruel et pervers mais lucide,  maître-mot de sa distanciation ironique. Après la corrosif Luna Park en 2005, expression de ses propres démons intérieurs, le lecteur se demandait jusqu’où Bret Easton Ellis allait pouvoir aller dans l’exorcisme de ses propres fantasmes et angoisses littéraires.

Suite(s) impériale(s) part pourtant d’une bonne idée. Mise en abîme de lui-même, l’auteur de Moins que zéro aurait menti sur la destinée de ses héros. Perplexes lors de la projection du film adapté du roman, les héros s’interrogent et retombent dans leurs angoisses et leurs vices d’hier. Renouant avec le trash , le sexe, la drogue, ces héros n’ont pas beaucoup évolué en vingt  cinq ans. Bret Easton Ellis prend les mêmes et recommence dans un Los Angeles évanescent, peuplé de fantômes et d’hallucinations …

Tout comme le héros de Luna Park, Clay reçoit d’inquiétants textos. Un jeep bleu le suit. Elle est le produit à la fois de ses fantasmes et de son imagination. L’angoisse et la violence sont montées à son paroxysme. L’univers parallèle du snuff movie maintient le roman sous tension et lui donne paresseusement ce caractère cruel et pervers. Le fameux Disparaître ici réapparait et le parcours de ses personnages perdus dans leur suites impériales prend très vite des allures de jugements derniers…

Toutefois même si tous les éléments sont là : l’humour noir, le glauque, le clinquant, la chirurgie faciale … La magie n’opère pas.

Cette non-zone où nul ne meure mais où tous s’évaporent sous l’éclat médiocre de leur reflet et de leur artificialité, devient vite une zone de non sens. Bret Easton Ellis trompe son spleen, son propre dégout de l’écriture par ce trop plein, cette intrigue qui tourne à vide. Suite(s) impériale(s) sent le toc , et l’ennui y domine.

Confessions, aveux, dernier sursaut ironique (on l’espère…) Suite(s) impériale(s) semble être alors le miroir jumeaux de ses propres personnages qui selon la propre expression de Bret Easton Ellis, ne sont plus qu’ « un visage qui imite un visage (…) tout est tombé, la peau a été retirée. »

PSE: Le roi du zouk est mort
Arnaud Denis joue et met en scène « Ce qui arrive et ce qu’on attend » de Jean-Marie Besset
Coline Crance

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