La conquête: critique d’un film (non) évènement sur Nicolas Sarkozy
La conquête vient de prendre d’assaut les salles français et toutelaculture a été le voir pour vous dès la première séance. Quelle ne fut pas notre surprise en voyant arriver Mr Brice Hortefeux, venu en tant que simple spectateur au Mk2 Odéon… La situation ne s’invente pas et la projection semble alors prendre tout son sens. Le buzz médiatique autour de la sortie du premier film sur un président encore en exercice a pourtant été balayé par l’affaire DSK. En dévoilant l’envers du décor et la vie privée du couple Sarkozy, la conquête rate sa cible et se complait dans l’anecdotique et le superficiel. Une déception.
Synopsis : 6 mai 2007, second tour de l’élection présidentielle. Nicolas Sarkozy, sûr de sa victoire, reste cloîtré chez lui, en peignoir, sombre et abattu. Toute la journée, il cherche à joindre Cécilia qui le fuit. Les cinq années qui viennent de s’écouler défilent: elles racontent l’irrésistible ascension de Sarkozy, semée de coups tordus, de coups de gueule et d’affrontements en coulisse. La conquête : L’histoire d’un homme qui gagne le pouvoir et perd sa femme.
La réalisation et l’acteur principal ne sont pas en cause et le film n’est pas un naufrage. Xavier Durringer soigne les cadres et la photo, se permet une mise en scène classique mais très élégante. Il réussit à imprimer le mouvement et le rythme nécessaire pou coller aux émotions instables du candidat Sarkozy. Denis Podalydes est lui tout simplement bluffant. D’un mimétisme vocal et gestuel saisissant, l’acteur réussit surtout le pari d’humaniser les émotions d’un homme à vif bourré de contradictions.
Le film reste malheureusement toujours dans la facilité. Une comédie de marionnettes où des imitateurs déclament des répliques chocs en boucle. Le scénario de Patrick Rotman est au mieux maladroit. Souvent irritant. Les personnages secondaires n’existent que par leur caricature la plus grossière. Dati colle aux basques. Chirac boit des bierres. Villepin prend des airs. Leurs dialogues sonnent toujours faux. Comme une mise bout à bout d’extraits de leurs déclarations “off”. Comme du mauvais théâtre de boulevard. La conquête ne parle presque jamais de politique. De com parfois. Du couple Cécilia/Nicolas surtout.
Grâce au talent de Denis Podalydes, l’histoire de cet homme partagé entre la lutte pour le pouvoir et le maintien de son mariage émeut par instants. L’angle choisi n’est malgré tout pas le plus intéressant. La conquête n’apporte en fait pas grand chose. Pour une vision politique de la campagne de 2007, on lui préfère le récit documentaire de Moati sur les quatre candidats principaux. Pour le portrait empathique d’un homme qui n’aurait jamais du avoir un destin national, on recommande le W d’Oliver Stone sur le parcours de George Bush. Le choix d’éviter le portait à charge contre un président impopulaire était une bonne idée. Mais en associant la politique à une vaste blague et la campagne présidentielle à des enjeux de marivaudage, La conquête caresse le spectateur dans le sens du poil, produit un gentil divertissement. On retiendra simplement quelques beaux moments, centrés sur le personnage lui même, où Denis Podalydes réussit à toucher des instants de vérité.
Gilles Hérail
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