Critique de Precious : jeune femme lève- toi, bats- toi
Soutenu par deux des célébrités afro-américaines qui comptent (Oprah Winfrey et Tyler Perry) Precious a réussi à se frayer un chemin dans la course aux Oscars de ce début d’année. A l’arrivée, un film tout sauf exceptionnel qui séduit malgré tout par quelques moments précieux où la naïveté l’emporte sur le pathos et le misérabilisme.
Qui est donc cette Precious qui s’impose sur l’affiche du film ? Une jeune fille de 16 ans, issue d’un quartier pauvre de New York, qui se fait renvoyer de son école à cause d’une seconde grossesse non désirée. Battue et humiliée par sa mère, violée par son père, Precious va trouver l’occasion de saisir sa chance dans une école alternative, où l’on prendra le temps de s’intéresser à son cas. La trame fait immédiatement penser à une certaine tradition du film social américain, où des enseignants passionnés tentent de donner un peu d’espoir à des élèves à la dérive dont Dangerous Minds (esprits rebelles) avec Michelle Pfeiffer reste encore le plus célèbre. L’histoire de Precious se situe d’ailleurs à la fin des années 1980 et reste dans une certaine nostalgie de ses habits improbables, et d’un son hip hop plus authentique.
Chaque année doit réserver son lot de surprises indépendantes au box office américain et Precious a du tenir ce rôle en 2009. La recette sent cependant un peu trop le réchauffé, et on découvre avec déception un emballage très formaté d’un sage « films à oscars ». Entre ses promoteurs de luxe (Oprah), ses guest stars « inattendues » (Mariah Carrey), et ses grandes performances d’acteur, les producteurs ont du se dire que quelques statuettes dorées ne manqueraient pas de tomber dans leur escarcelle. La montée du drame en crescendo vers un final très larmoyant où la mère de Precious s’excuse de tous les malheurs qu’elle lui a causés est ainsi irritante, puisque voulant à tout prix arracher quelques larmes au spectateur.
Tout n’est pas à jeter dans le film, loin de là. Le casting tout d’abord, et notamment son interprète principale et ses camarades de classe croquent des personnages un peu caricaturaux, mais très attachants. Les moments d’humour (et ils sont assez nombreux) sont aussi très réussis : plus elle étudie, plus Precious s’ouvre aux autres, relâche la tension, et redevient une fille de 16 ans, avec ses préoccupations plus futiles. Les scènes d’échange entre la prof et sa classe sont savoureuses et dynamiques: apprendre à s’en sortir, redonner espoir. L’American Dream revisité avec une forte dose de féminisme peut revivre du moment que le groupe peut aider ceux sur qui le destin s’est acharné.
Meilleur quand il ose une poésie naïve dans des scènes où Precious se rêve star inaccessible, défilant en robe de soirée devant des fans hystériques, le film en fait souvent trop pour pleinement convaincre. Une déception qui ne doit pas occulter le caractère tout à fait regardable du film, qui fait passer un bon moment tout en martelant une morale positive qui reste toujours aussi efficace.
Gilles Hérail
Precious, sortie le 10 mars
One thought on “Critique de Precious : jeune femme lève- toi, bats- toi”
Commentaire(s)