
“Le vent de la liberté” : le récit superficiel d’un passage à l’ouest
Inspiré d’une histoire vraie, le film revient sur l’exploit de deux familles est-allemandes qui ont fui leur pays en montgolfière à la fin des années 1970. Si les comédiens sont convaincants, le scénario peine à dresser le portrait de la RDA que l’on pouvait attendre.
Par Sabrina Cicchini
En 1979, les familles Strelzyk et Wetzel projettent de rejoindre l’Allemagne de l’Ouest en montgolfière. Après un premier échec, les fuyards décident de retenter leur chance. Le temps presse : la Stasi, police politique de la RDA, est sur leur trace.
Une aventure familiale
Lorsque nous rencontrons les Strelzyk, ils ont déjà mis leur plan à exécution : leur montgolfière est construite. Ils se lancent après avoir appris à la radio que le vent du Nord tant attendu soufflerait dans la soirée. La tentative est infructueuse. La famille s’écrase en pleine forêt. Ils n’ont d’autre choix que de rentrer chez eux. Comme si de rien était. Les maisons du quartier deviennent des miradors. Les voisins, la collègue de bureau, la vendeuse du magasin sont de potentiels mouchards. Le réalisateur Michael Herbig quitte rarement la cellule familiale, renforçant ainsi notre propre défiance à l’égard de tout quidam. Friedrich Mücke est convaincant dans le rôle de Peter, chef de famille et cerveau de l’opération. Sa partenaire, Karoline Schuch, incarne aussi très bien l’épouse tiraillée entre la peur et la soif de liberté. Une histoire extraordinaire, de bons interprètes. Et pourtant, nous regretterons que le manque de hauteur du scénario.
Une paresse scénaristique
Leur montgolfière est aux couleurs de l’arc-en-ciel. Un pied-de-nez symbolique à ce pays qu’ils détestent. Pourquoi partent-ils ? Une fois de l’autre côté, ses enfants seront libres dit Peter Strelzyk. Le père de famille ne poussera pas l’explication plus loin, pas plus que les scénaristes tout au long du film. Les interrogatoires de la Stasi, une traque hollywoodienne en hélicoptère, si elles transcrivent la brutalité répressive de ce régime, ne suffisent pas à montrer sa perfidie au quotidien. Les pénuries, le contrôle des médias, la standardisation des constructions : tout cela est survolé. Négliger ces aspects du régime est-allemand, c’est négliger le parcours des protagonistes, leurs motivations, leurs douleurs. Ces lacunes scénaristiques dilapident le potentiel émotionnel de cette histoire. Dommage, la matière était là …
“Le vent de la liberté” de Michael Herbig avec Friedrich Mücke, Karoline Schuch, David Kross, Alicia Von Rittberg et Thomas Kretschmann. Allemagne, 2h06, Sortie ARP selection, le 10 avril.
visuel : affiche du film