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[Critique] « Birdman » d’Alejandro González Iñárritu. Mise en scène et acteurs brillants, propos convenu et creux

[Critique] « Birdman » d’Alejandro González Iñárritu. Mise en scène et acteurs brillants, propos convenu et creux

28 February 2015 | PAR Gilles Herail

4 Oscars dont meilleur film et meilleur réalisateur. Birdman a tout remporté (exceptée la statuette de meilleur acteur pour Michael Keaton) et l’attente était peut être trop forte. Inarritu sait utiliser sa caméra et dirige d’excellents acteurs. Plusieurs scènes sont mémorables, le plan séquence intrigue, mais le réalisateur perd rapidement son humour noir salvateur pour tomber dans un propos creux et caricatural sur la condition d’acteur. Brillant mais pas follement passionnant.  

[rating=2]

Synopsis officiel: À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego… S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir…

Birdman aurait pu être considéré comme un simple plaisir technique, de pure mise en scène, s’il n’avait pas été à ce point encensé par la critique internationale. Lui reconnaissant un œil acéré sur l’évolution d’Hollywood et une bouleversante mise en abyme de la carrière de Michael Keaton. La projection du film déçoit alors forcément. Car à l’image du cinéma d’Iñárritu, Birdman produit de belles images, cherche des idées de mise en scène, récolte quelques moments de grâce chez ses acteurs. Mais se prend toujours très au sérieux, malgré un manque de profondeur et d’humanité. Le réalisateur mexicain s’attaque ici à Hollywood et Broadway, en nous racontant que les blockbusters n’ont pas d’âme, que les critiques sont aigris, les actrices caractérielles, la drogue dangereuse. Et qu’un acteur de cinéma populaire souhaite souvent trouver sa légitimité sur les planches.

L’ironie présente par moments aurait pu donner une comédie noire ouvertement outrancière, moquant l’auto-satisfaction d’un cinéma qui ne cesse de se regarder le nombril. Mais plus le film avance, plus Iñárritu redevient sérieux. En poussant jusqu’à l’extrême la folie grandissante du personnage principal, interprété par Michael Keaton. L’acteur est excellent mais sa schizophrénie bigger than life et son irritante petite voix intérieure nous laissent de marbre. Les tirades existentialistes sont longues et le propos plus que convenu. C’est du côté des seconds rôles que Birdman trouve plus de finesse. Et d’émotion. Notamment avec le très beau personnage d’Edward Norton, le seul à ne pouvoir être rangé facilement dans une case pré-établie. A la fois sûr de lui, charismatique, minable, insupportable, pourtant touchant. Ses scènes toutes simples avec Emma Stone donnent au film la légèreté dont il manque cruellement. Et surtout de l’incarnation. Car l’histoire ne passionne pas et l’on se retrouve alors à regarder les images qui sont elles assez bluffantes.

Le principe du (faux) plan séquence unique est plus qu’un concept théorique et produit des effets étonnants. Iñárritu désoriente le spectateur, embarqué dans un mouvement permanent, cassant les règles d’unité de temps et d’espace. Les touches de fantastique liées au démon intérieur du personnage principal sont très réussies. La caméra filme des ambiances surréalistes et colorées, une ville écrasante dans une étonnante scène où le héros se retrouve en plein centre de New-York à moitié nu. Elle s’immisce dans les moindres recoins d’un théâtre que l’on s’approprie de plus en plus tout au long du film. Cette mise en scène ambitieuse, créative, éveille l’intérêt. Mais ne se raccroche quasiment jamais à une émotion ou à une thématique. Avec une impression finale que l’on avait déjà dans Biutiful. Un sujet n’étant qu’un prétexte. Une histoire pour meubler. L’objectif étant plutôt d’épater en images et en “performance” d’acteur. Quitte à aller dans ce type de cinéma, on aurait préféré un film de pure sensation, à la Gaspard Noé, plutôt qu’une fausse comédie noire cynique perdant son ton en cours de route.

Gilles Hérail

Birdman, un film américain d’Alejandro González Iñárritu avec Michael Keaton, durée 1h59, sortie le 25 février 201

Bande-annonce et visuels officiels.

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Gilles Herail

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