
New Frontier : l’art américain entre au Louvre
En 2011, le musée du Louvre a accueilli 700 000 Américains, soit une augmentation de 32% de cette population. Et le Louvre de devenir le « troisième musée américain du monde »… Afin de célébrer et de renforcer cet intérêt mutuel, selon la volonté d’Henri Loyrette, un partenariat de quatre ans vient d’être inauguré entre le Louvre et le High Museum of Atlanta, le tout récent Crystal Bridges Museum of American Art, en Arkansas, et la Terra Foundation for American Art. Première étape de cette collaboration : une exposition-dossier consacrée à Thomas Cole (1801-1848) et à la naissance du paysage américain.
Bien entendu, des Américains de renom sont régulièrement célébrés au Louvre – citons Cy Twombly, Toni Morrison, ou encore Nan Goldin l’an passé. Pour autant, à travers cette coopération scientifique et pédagogique, le président-directeur du musée espère combler les lacunes observées dans les collections du musée, en ce qui concerne l’art américain du 19e siècle. L’association des American Friends of the Louvre apporte tout son soutien à l’initiative.
« Thomas Cole et la naissance de la peinture de paysage en Amérique » a été conçue comme la pierre fondatrice de ce projet. Malgré ses dimensions modestes, l’enjeu est de taille : les tableaux de Cole et de son acolyte Asher B. Durand retracent pour nous l’histoire du premier genre pictural identitaire américain, c’est-à-dire les prémices du mouvement qui sera connu sous le nom de Hudson River School.
Thomas Cole est un des premiers artistes à avoir illustré le Dernier des Mohicans, publié à New York en 1826. Fidèle à ses observations, l’artiste n’hésite pas à faire rougeoyer sa toile sous les couleurs de l’été indien, ce qui laissera les critiques européens plutôt perplexes…
Certes, l’artiste est né en Angleterre, et les voyages qu’il effectuera en Europe auront une grande influence sur son style – il admire notamment au Louvre les œuvres de Claude Lorrain et du Poussin, ou encore le travail de Turner et de Constable.
Cependant, comme en attestent les nombreuses expéditions qu’il mènera dans les Adirondack puis dans les Catskills, au nord de l’État de New York, c’est bien la singularité du paysage de la jeune nation américaine qui fascine et inspire Thomas Cole et ses disciples. Si les Impressionnistes ont fait date par leur capacité à restituer les vibrations de la lumière, en investissant les paysages comme des décors propices à l’émergence de loisirs de plein-air, les peintres de la Hudson River School célèbrent la communion de tout un peuple avec son territoire, où la wilderness revêt des allures de Terre Promise.
À travers l’évocation du bétail paisible et d’une végétation généreuse, restitués avec une grande intensité de chromatismes, c’est un véritable sentiment mystique qui se dégage de ces toiles. Leur témoignage est celui de la foi en la prospérité d’une nation qui découvre alors ce qui s’imposera comme un des atouts majeurs de son identité : l’espace.
Visuel : La Croix dans la solitude, Thomas Cole © 2008 RMN / Jean-Gills Berizzi
Paysage avec figures : scène du « Dernier des Mohicans », 1826 © Terra Foundation for American art, Chicago
Le Bon Pasteur, 1848 © courtesy Crystal Bridges Museum of American Art, Bentonville, Arkansas