Le bestiaire surréaliste d’André Masson au Musée de la Poste
Figure clé du surréalisme, André Masson est parfois trop peu connu. Après avoir été place au cœur de l’exposition «Jackson Pollock et le chamanisme » à la Pinacothèque de la Madeleine, le maître crève l’affiche d’une exposition importante au Musée de la Poste. Si l’expression « bestiaire surréaliste » est une lapalissade qui marque bien les limites conceptuelles du projet, les pièces exposées valent bien plus que quelques timbres.
Photo : Jeune fille dans une basse-cour (Le Dindon), huile sur toile, 1947, 112×87 cm, Coll.Abel Rambert © André Masson © Adagp Paris 2009
Meilleur ami et beau-frère de Georges Bataille, avec qui il a créé la revue « l’Acéphale » dans les années 1930, André Masson (1896-1987) est un grand maître surréaliste. Pour ceux et celles qui ne le connaissent qu’à travers ses plafonds du Théâtre de l’Odéon, l’exposition du Musée de la Poste est l’occasion de découvrir la richesse de son œuvre.
En effet, le thème du bestiaire a l’avantage de n’être pas très pointu. Tout parle d’animalité dans l’œuvre de Masson, et ce, quelle que soit la période de sa vie. Il s’agit d’une animalité à la Maldoror, à la fois grouillante et symbolique. Le mythe est le fond de ce bestiaire, qui réfléchit –en bon surréaliste- les pulsions éternelles de l’homme. Si les textes donnés au visiteur sont plus factuels qu’analytiques, et si l’exposition est un peu trop simplement classée selon les thématiques du règne animal que la commissaire de l’exposition tente de faire correspondre à des moments de la vie de Masson et de ses contemporains (oiseaux meurtris et chiens enragés après la Première guerre mondiale, taureaux et tauromachie pour la guerre d’Espagne, viols de femmes par des bêtes pour les dessins érotiques, crustacés variés dans l’après), la somme des toiles exposées est imposante. L’on y retrouve les grands tableaux de l’âge d’or du surréalisme ( « Les chevaux de Diomède », “Insectes dans un champ de Blé” (1934), « Les magiciens », « Actéon » (1936)), et leurs successeurs plus expressionnistes qui ont inspiré Pollock, De Kooning et Gorky,, comme la belle affiche de l’exposition, « Le Dindon » (1947).
Photo : Insectes dans un champ de blé, 1934, huile sur toile, 53×72 cm Coll. particulière, Marseille © Photographie Jean Bernard.
On peut aussi y voir les tableaux de sables des années 1920, l’autoportrait de 1947, un délicieux cabinet de lithographies érotiques à faire pâlir Picasso, et des estampes illustrant des textes littéraires. Les dessins sont également fascinants, avec la précision un peu folle des coquilles des langoustes, des arêtes des rascasses, et des antennes des cigales.
C’est l’occasion de (re)découvrir l’œuvre d’André Masson et un joli petit musée pas si petit que ça et trop peu connu.
« Le Bestiaire d’André Masson », Jusqu’au 5 septembre 2009, Musée de la Poste, 34 bd de Vaugirard, Paris 15e, M° Montparnasse-Bienvenue, lun-sam, 10h-18h, 6,50 euros (TR : 5 euros).
Yaël Hirsch