Arts
Gleizes et Metzinger au Musée de la Poste

Gleizes et Metzinger au Musée de la Poste

Après s’être transformé en une antre aux sorcières, le Musée de la Poste se morcelle au contact des milles fragments cubistes de Gleizes et Metzinger du 9 mai au 22 septembre 212. L’exposition vous invite à parcourir les oeuvres étourdissantes de deux artistes majeurs du cubisme, aujourd’hui oubliés du grand public face à la prééminence des figures emblématiques de Picasso et de Braque.

L’Exposition « Gleizes-Metzinger : Du Cubisme et après » nous donne à revoir et réinterpréter le cubisme à l’aune de ses artistes les moins connus, En France, Metzinger n’eut comme dernière exposition que celle de 1953. Gleizes, quoique plus représenté, ne laisse semble-t-il un souvenir qu’aux Etats-Unis.

Ce sont pourtant ces deux artistes qui signeront, en 1912, le premier traité théorique sur le cubisme (Du « Cubisme »), un an avant le célèbre Les Peintres cubistes d’Apollinaire ; qui seront les relais de l’art cubiste entre les diverses avant-gardes parisiennes ; qui fédéreront les Duchamp et Villon autour de la Section d’Or, véritable groupe de recherche tentant de retrouver l’harmonie de la forme et de la couleur dans le nombre d’or. Gleizes et Metzinger, sans jamais entrer dans l’abstraction, ouvrent ainsi tout un pan mathématique à l’art en lui permettant de réfléchir sur la proportion de la nature et la totalité de l’objet.

L’exposition commence bien heureusement par une perspective croisée sur les deux artistes, sans toutefois tomber dans la facilité d’une superposition : tout oppose Gleizes et Metzinger, est-il rappelé, – leur milieu, leur parcours, leur mode de vie. Ainsi, l’impressionnisme et le goût pour le dessin de l’un contraste d’avec le pointillisme et le néo-impressionnisme presque fauve, parfois, de l’autre. Cette première période s’achève par la rencontre des deux artistes bientôt amis en 1910, et souligne dans le même temps que cette divergence dans l’approche de la peinture aboutit dans les deux cas à l’émergence du cubisme.

La deuxième partie est consacrée au groupe de la Section d’Or, fer de lance d’une nouvelle avant-garde qui fera le pont entre les très solitaires Picasso et Braque, et les œuvres des Duchamp, Villon, Gleizes et Metzinger, ces derniers apparaissant très vite comme les chefs de file du courant cubiste, lors de la première exposition de la Section d’or, Picasso et Braque en étant absents. On appréciera le choix de la commissaire de rendre cette ambiance particulière, offrant les tableaux d’un groupe et non seulement des deux principaux artistes : on y voit la diversité de leur production, la naissance d’un cubisme bien loin des clichés (notamment celui d’une peinture terne, sombre et volumétrique) : la palette de couleurs large, parfois acidulée de l’Oiseau de Léopold Survage (1915) contraste d’avec le traité rectiligne des figures et immédiatement cubistes, fermé dans son approche de la couleur d’œuvres telles le Portrait du poète Paul Catiaux de Henri Le Fauconnier (1910), et de son pendant : Les Arbres, d’Albert Gleizes (1912), parfaitement mis en valeur. Tous ces artistes se lient dans la recherche constante d’une voie nouvelle à l’art, d’un cubisme en formation.

La troisième et dernière section retrouve l’opposition entre Gleizes et Metzinger dans leurs parcours respectifs après 1914 : la Guerre signe la dispersion du groupe cubiste et le renouvellement de la forme picturale – exit les corps décomposés, morcelés, que l’on ne voit que trop sur le front. Gleizes, qui s’installe aux Etats-Unis, retrouve le thème de la modernité plutôt que la fragmentation du corps : c’est un Port peint en 1917, mêlant en son sein toutes les villes et toutes les perspectives ; ce sont des peintures « rythmées », des compositions, des arabesques prenant bientôt le pas sur l’aspect encore réaliste des études cubistes. Metzinger, quant à lui, poursuit dans la même voie à Paris avant d’amorcer un retour à la figuration : ce sont Paysage de banlieue (1924) ou L’Ecuyère (1924), notamment. Metzinger cherche une nouvelle manière et, dans le même temps, à vendre ses œuvres, quitte à créer de nouvelles œuvres cubistes (antidatées de 1910-1915).

Nous retenons ainsi une exposition claire et construite, précise et tout-à-fait mesurée, ne cherchant pas la facilité : elle nous montre les deux voies du cubisme, et ses deux issues ; Gleizes et Metzinger faisant tous deux figures d’exemples par l’œuvre.

Nous ne saurions trop vous recommander d’aller saluer un travail méconnu, qui plus est dans un parcours parfaitement mené.

 

 

 

Crédits photos :

Visuels : Albert Gleizes, Femmes assises devant une fenêtre (détail), 1914 © ADAGP, Paris 2012. Collection privée Solange Landau New York ©  photo maison de vente Aguttes. – Jean Metzinger (détail), Le Goûter, 1917 © ADAGP, Paris, 2012. Courtesy galerie Daniel Malingue, Paris – La Poste – S.A. au capital de 3 400  000 euros – 356 000 000 RCS PARIS Siège Social : 44 boulevard de Vaugirard – 75757 PARIS CEDEX 15 – Graphiste Ph. Rodier, l’Adresse Musée de la Poste, 2012

Jean Metzinger, Maternité, 1911, huile sur toile, 91,5×64,8. Courtesy J. de la Beraudière.

Albert Gleizes, Maternité glorieuse, 1935-1937, huile sur toile, 99×75. Fondation Albert Gleizes © photo Jean Bernard.

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