
Démission collective aux Cahiers du cinéma
Les journalistes des Cahiers du cinéma ont annoncé leur démission de la revue mythique de Truffaut, par crainte de la mainmise des nouveaux actionnaires. Retour rapide sur les faits.
Les Cahiers du cinéma se sont vu racheter début février par plusieurs actionnaires, parmi lesquels Xavier Niel, mais aussi des producteurs de cinéma comme Pascal Caucheteux (Why Not Production) et Julie Lethiphu, déléguée générale de la Société des Réalisateurs de films. Cette situation crée chez les journalistes la peur de ne plus pouvoir se prononcer avec sincérité sur les films qui sortent, tant il deviendrait difficile de brocarder une œuvre produite par un actionnaire. Au-delà de la seule question des Cahiers du cinéma eux-mêmes, cette position s’inscrit dans un débat général sur l’indépendance de la presse, quand de plus en plus de titres sont aux mains de quelques grands groupes.
Il s’agit en outre pour les journalistes des Cahiers de revendiquer un positionnement fort, étroitement lié à l’histoire du média : l’exigence cinématographique, sans complaisance, dans la lignée du fameux article de Truffaut sur “Une certaine tendance du cinéma français”. Une place importante accordée au cinéma d’auteur et à l’international, mais aussi une sensibilité de gauche – on se souvient du soutien de Truffaut au mouvement étudiant en Mai 68 -, qui transparaît ces derniers temps dans la couverture du mouvement des Gilets jaunes ou des dispositifs Parcoursup et Pass Culture. Des positions qu’il deviendrait de plus en plus difficile à défendre, avec des banquiers comme Grégoire Chertok ou des hommes d’affaires comme Marc Simoncini, ce qui expliquerait que les journalistes aient décidé de faire jouer la clause de cession, qui leur permet de démissionner en faisant valoir leurs droits au chômage en cas de changement de propriétaire.