
Avignon OFF : l’univers du “Music Hall” !
L’univers du music hall n’est pas toujours tendre avec ses artistes. La pièce Music Hall de Jean-Luc Lagarce retrace l’histoire de cette fille bercée d’illusions dans un monde où il est difficile de se faire sa place. Un spectacle à découvrir durant le Festival d’Avignon.
L’écriture singulière de Lagarce
La jeune metteuse en scène Sophie Planté a eu l’audace de présenter la pièce de Jean-Luc Lagarce Music Hall à Avignon, déjà mise en scène des dizaines de fois en France et à l’étranger. C’est avec talent qu’elle réussit à faire sonner ce texte si singulier, bercé par l’écriture inhabituelle d’un auteur de renom.
Comme tous les soirs depuis maintenant un certain temps, la fille prend place sur la scène d’un music hall pour faire son show. Comme tous les soirs, il faut savoir s’adapter au lieu, au matériel, aux régisseurs. Comme tous les soirs, il faut se retenir de crier et prendre sur soi, accepter les conditions dérisoires et jouer. Jouer même s’il n’y a personne dans la salle, jouer même si le cœur n’y est pas toujours.
L’écriture de Lagarce a pour particularité de se baser sur les répétitions. Il revient sur ses phrases, reprend les mêmes mots, opère des retours en arrière pour mieux repartir. Cette écriture donne à voir un même show de diverses manières. On est plongé dans les souvenirs de cette Fille qui revit indéfiniment ses représentations. Cette Fille bercée d’illusions, qui rêve d’être une diva, mais qui doit faire face à des situations ridicules et désespérantes.
L’univers du music hall
Sophie Planté a réussi avec une scénographie très simple à rendre compte de l’univers du music hall. Sur un parquet craquant se dressent un tabouret, un piano, un rideau à franges argentées, une table à roulette dressée d’une valise-loge et un portant à vêtements. S’ajoutent à cette scénographie quelques objets : des valises et un magnétophone à bandes magnétiques. Tout est vieux et délabré. Il pèse sur scène une atmosphère lourde, emplie de mélancolie. Une unique source de lumière, un halo blanc bancal qui tente de suivre les comédiens.
A faire ce show et à raconter leurs aventures désespérantes, ils sont quatre : la Fille, le Premier Boy, le Deuxième Boy et le pianiste. Leurs costumes délabrés et poussiéreux respirent leur misère. Leur maquillage affiche fièrement leur tristesse. D’un côté, le pianiste semble sortir de sa tombe, les yeux noirs et le teint pâle, de l’autre, les Boys arborent un sourire forcé, les pommettes d’un rouge éclatant. Quant à la Fille, sa tenue et son maquillage se détériorent petit à petit, au fil de la dégringolade. Elle qui voulait briller sous les projecteurs se retrouve terrassée par la réalité.
Un show de music hall
Ce même show répété, et répété, et répété mêle au théâtre la musique, le chant et la danse. Sur la mélodie du piano, la chanson “De temps en temps” de Joséphine Baker résonne. Tous chantent, à tour de rôle, et réalisent les pas d’une petite chorégraphie. Leur show est touchant, il respire le désir d’être vu et écouté.
Music Hall vous fait entrer dans un monde de fantasmes, celui d’une Fille qui veut être aimée mais qui fait face aux dures journées qui s’enchaînent inlassablement. Un spectacle adapté de Jean-Luc Lagarce, mis en scène et chorégraphié par Sophie Planté, interprété par Sophie Planté, Charles Leys, Yohan Leriche et Vincent Lagahe. Présentée du 7 au 30 juillet, à 21h25, à Pierre de Lune, dans le cadre du festival OFF d’Avignon 2022.
Visuel : © Jordan Espitalier