
Nouons-nous : Emmanuelle Pagano joue les variations des noeuds amoureux
L’auteure du Tiroir à cheveux (POL,2005) passe des nouvelles entremêlées du Renard à mains nues (POL, 2012) à un format encore plus court et focalisé sur toutes les addictions physiques qui ont trait à l’amour.
L’amour ce n’est pas seulement l’œil lumineux de l’éphèbe épris ou les larmes pures et amères de l’amante trahie délaissée. Il y a aussi : les papillons dans l’estomac qui étouffent la rencontre, la lourdeur de l’habitude d’être dans le même lit chaque nuit depuis 25 ans, la honte d’exposer son corps vieillissant, la culpabilité de tromper ou la morve au nez …Tous ces phénomènes physiques, de l’amour, ces nœuds impossibles à défaire, Emmanuelle Pagano les décline en plusieurs dizaines de variations d’une trentaine de lignes. Toujours à la première personne, elle offre ainsi à lire un kaléidoscope des stigmates de l’amour, dans un style qu’on ne peut que suivre comme le courant d’un fleuve. Romantiques s’abstenir! En revanche les amateurs de grand style et les anthropologues poétiques se précipiteront.
Emmanuelle Pagano, Nouons-nous, POL, 208 p., 16 euros. Septembre 2013.
“Elle porte des soutiens-gorge même en dormant, elle ne supporte pas de sentir le pli de ses seins contre son propre torse, ce pli du vieillissement des tissus qu’elle appelle le pli du temps. Certaines nuits, je me place dans son dos, je dégrafe son soutien-gorge et je remplace les armatures de mes mains, je soutiens sa jeunesse”. p. 35