Essais
“Fantômes de la renommée”, la mécanique du rock d’Antoine Couder

“Fantômes de la renommée”, la mécanique du rock d’Antoine Couder

22 June 2017 | PAR Amelie Blaustein Niddam

“Ça part un peu dans tous les sens …Mais oui, pourquoi pas ?” Antoine Couder semble jouer les cyniques, désabusé et témoin d’un monde pas vraiment disparu, en attente du dernier souffle. Ce souffle-là est celui des Fantômes de la renommée,  qui sort à l’instant chez Médiapop Editions

[rating=4]

C’est l’histoire d’un mec dont la vie croise celle d’une grande rupture dans l’identité du rock. Lui est né en 1964 bien après qu’Elvis se soit déhanché. Il est aujourd’hui un quinqua “naïf” qui voit son gamin devenu un homme remixer un air triste de Lhasa de Sela en faisant taire son inconscient.  Les fantômes, ce sont ces monuments de l’histoire du rock qui n’ont pas gardé le rythme. “C’est l’épilogue du baby-boom, des héros qui battent en retraite, fondant sous la pression de la nouvelle génération qui, enfin, dépasse en nombre et pour la première fois celle qui a grandi entre 1947 et 1965, aujourd’hui âgée de 51 à 69 ans”

Ici les temporalités s’enchevêtrent. L’immédiat de la sociologie, la lenteur de la psychanalyse ou la réalité de l’économie. Pour Antoine Couder tout se résume à la musique car tout peut se dire en musique, le flirt comme le deuil.

Le rythme de l’écriture est lui une boucle électro aux drops succédant aux breaks violents. Un mot ou plutôt un nom nous fait passer de Paris à New-York, d’une anecdote personnelle à un club de travestis où la voix de  P-Orridge ne fait aucun doute sur sa première identité sexuelle.

Rodolphe Burger, qui a préfacé cet essai voit juste quant il écrit : “Attendez-vous à quelques secousses. Et à des enchaînements virtuoses. Les slows sont rares dans la playlist”. Et dans cette playlist démente où tout commence par Zappa pour finir sur une chanson d’Yves Simon, les styles et les années  s’entrechoquent. La pop serait-elle  rock ? La pop culture est-elle pop-rock ?

La réponse est mécanique. Le plus bel apport du livre se trouve dans la longue réflexion (qui occupe la moitié de l’ouvrage) sur la technique et l’arrivée des machines. La machine ne fait pas la musique, mais les gamins des années 90 eux, ont compris que l’on pouvait compresser, accélérer et modeler comme de la pâte les vinyls et les sons. Le morceau remplace la chanson et les DJ’s sont des stars qui jouent sur un autel.

Si le point de départ est le rock, il vient dire comment la seconde partie du XXe siècle vient regarder les genres se faire en parallèle. Il y a Bowie et la disco en même temps.  Et les Daft Punk réinventent cela aussi :  l’apport du passé dans le présent. On croise aussi bien Mick Jagger que Dean Martin dans cette épopée du siècle dernier. Ces fantômes-là ne font pas peur, ils nous font et nous feront danser, et pourquoi pas avec vue sur mer.

L’ironie est là :  Les fantômes de la renommée ne peut se lire qu’avec son appli de streaming ouverte sur son téléphone. Finalement, ces fantômes sont des survivants et Antoine Couder signe un livre totalement  XXIe siècle qui interroge la musique comme un lieu de mémoire, regardant un passé immédiat qui a l’air déjà d’appartenir au Moyen Âge… Ironie de l’accélération des machines il faut croire….

Antoine Couder et Rodolphe Burger seront en dédicace le 27 juin à partir de 19h30 au Cannibale Café

Antoine Couder, Fantômes de la renommée, Médiapop, en librairies, 18 €

 

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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