Théâtre
Trois contrefaçons : Laurent Bazin passe à l’autofiction

Trois contrefaçons : Laurent Bazin passe à l’autofiction

07 February 2023 | PAR Amelie Blaustein Niddam

En se renouvelant sur le fond et la forme, Laurent Bazin tombe le masque pour en prendre d’autres. Au Festival Les Singulier.es, le metteur en scène nous dévoile une passion amoureuse qui brouille toutes les frontières : le vrai, le faux, le visible et l’invisible. Jubilatoire !

“Le jeu c’est de ne plus savoir”

Trois contrefaçons : Bucarest / Ibiza / Venise se place dans une filiation. Le genre de l’autofiction est très à la mode dans la littérature. Elle est également très présente dans le théâtre, et notamment les journaux intimes (Jean-Luc Lagarce, Tolstoï, Amiel…). Cette création se place également dans la droite ligne du travail de Laurent Bazin mais en faisant un pas de côté. Dans chacun de ses spectacles, nous sommes équipés, normalement, d’un casque de réalité virtuelle (Le Baptême, Les Falaises de V). Mais là, le masque qui nous a été donné est bien réel. C’est un cercle soit uni noir, soit à paillettes réversibles noires et or ( évidemment celui que l’on a choisi !), rigide, barré dans son intérieur d’une tige de plastique. (Et non, on ne vous dira pas ce que c’est !)

“Toi la Créature, moi Laurent”

Pour résumer, nous suivons Laurent qui, lui, suit La Créature dans trois villes à haut potentiel de storys : Bucarest, Ibiza et Venise. La Créature est hybride, elle se dévoile sur Instagram. Elle a l’air absolument fascinante. Nous apprenons qu’elle se considère même comme étant “une déesse”. Tout le monde tomberait fou amoureux d’elle. Elle donne rendez-vous, annule, subjugue. Elle rend dingue !

Entre performance et immersion, la pièce nous installe dans un rapport très sensoriel au récit. C’est flou tout le temps. Le texte est haché, coupé. Les interactions entre le metteur en scène et ses comédien.es (impeccables Fabien Joubert et Chloé Sourbet) sont là pour nous troubler : est-ce une répétition, un spectacle dans le spectacle ? On a la sensation plutôt très cool d’assister à une projection d’un film du Dogme, mais au théâtre.

“Des preuves irréfutables d’un récit factice”

La scénographie est faite d’un espace lui aussi en mouvement, qui peut s’ouvrir. Chaque ville nous entraîne dans un ailleurs encore plus profond. Laurent Bazin vient nous dire : ne crois pas ce que tu vois et il va plus loin en nous occultant le pouvoir de voir, parfois. L’ensemble est époustouflant de maîtrise. Tout à l’air improvisé, fait avec désinvolture alors qu’il est évident que le contrôle est partout.

Le procédé est brillant.

Il faut juste s’autoriser à partir en voyage. Si vous le faites, vous rirez souvent, vous chanterez faux et fort du Félix Gray et vous serez saisi par la vraie beauté d’un faux coucher de soleil à Ibiza, à moins que ce ne soit à Venise !

Et qui sait… peut-être que vous verrez apparaître LA créature !

Jusqu’au 17 février au Théâtre 13.

Visuel : Svend Andersen

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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