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“Morphé” de Simon Falguières : une ode à l’émerveillement

“Morphé” de Simon Falguières : une ode à l’émerveillement

05 May 2023 | PAR Julia Wahl

Simon Falguières continue son exploration du conte étiologique avec Morphé, un spectacle jeune public qui accorde une large place à la magie et à la poésie. Seul au plateau, il incarne divers personnages qui tentent de donner du sens à un monde qui n’en a pas.

« Emerveille-toi ! »

Pierre ne veut pas dormir. Il est grand et le fait savoir. Mais, l’interroge sa mère, depuis quand un enfant peut-il prendre ce genre de décision ? Le fils et la mère concluent un accord : Pierre accepte de dormir ; en échange, Masha, sa mère, lui raconte une histoire. Pas n’importe laquelle : son enfance dans le ventre de la Baleine bleue, le petit théâtre de bois créé par son propre père. Un théâtre en forme de havre et de consolation, alors qu’une guerre, toute proche, éclatait.

Fidèle à son univers peuplé de fées et de héros mythologiques, Simon Falguières nous conduit dans un conte étiologique, où Cronos et Gaïa côtoient les rois belliqueux. A son habitude, si la réalité de notre monde affleure, elle s’introduit dans la pièce sur la pointe des pieds. Ce n’est sans doute pas un hasard si les soldats s’expriment dans une langue aux sonorités slaves… Mais l’essentiel est ailleurs. Il est dans la nécessaire présence du merveilleux quand le réel nous échappe. « Emerveille-toi ! », enjoint-on à l’enfant.

Corps mécanisé et objets humanisés

La merveille puise alors à une pluralité de sources qui, loin de s’opposer, participent toutes de cette création d’un ailleurs. C’est le cas des personnages qui peuplent la fable, mais aussi de la belle scénographie qui nous construit, en fait de théâtre, un étrange sous-marin, où les tiroirs s’ouvrent tout seuls et où des cubes multicolores apparaissent. Le château de La Belle et la bête de Cocteau n’est pas loin.

L’insolite apparaît également dans le jeu de Simon Falguières, dont l’interprétation emprunte aux codes du clown. Un clown bien surprenant : au centre de son visage, son nez n’est pas rouge, mais noir. Son corps mécanisé, qui semble lui échapper, provoque simultanément le rire et un sentiment d’irréel. Avec son pantalon un peu grand et sa démarche saccadée, il nous fait penser au Charlot des Temps modernes, agi par les machines plus qu’il n’agit sur elles. Ce faisant, il nous invite à réenchanter un monde gouverné par les objets, afin de rendre à l’imagination humaine la place qui lui revient.

Générique

Texte, mise en scène, scénographie et jeu : Simon Falguières

Accessoires et plateau : Alice Delarue

Création lumières : Léandre Gans

Création Sonore : Celsian Langlois

Création Costumes : Lucile Charvet

Assistant à la mise en scène : David Guez

Régie lumière : Léandre Gans – Lison Foulou

Régie plateau : Alice Delarue – Roméo Rebiere

Régie son : Celsian Langlois

En tournée

du 22 au 27 juillet 2023 – Les Tréteaux de France – CDN
2 septembre – Festival du Moulin de l’Hydre, Saint-Pierre-d’Entremont (61)
du 19 octobre au 5 novembre 2023 – Théâtre Paris Villette
du 25 au 29 mars 2024 – Comédie de Caen – CDN de Normandie
avril 2024 – Transversales – Scène conventionnée de Verdun

Visuel : © Christophe Raynaud de Lage

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Julia Wahl
Passionnée de cinéma et de théâtre depuis toujours, Julia Wahl est critique pour les magazines Format court et Toute la culture. Elle parcourt volontiers la France à la recherche de pépites insoupçonnées et, quand il lui reste un peu de temps, lit et écrit des romans aux personnages improbables. Photo : Marie-Pauline Mollaret

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