[Avignon Off] Deux Ayala pour le prix d’un. On veut plus
“Macbeth, The Notes ». Ou David Ayala dans le rôle d’un metteur en scène épris du “théâtre de la distorsion”, “de la combustion”, “du passage”… qui nous propose une délirante séance de notes – ou “debriefing» – à la sortie d’une répétition de Macbeth. Macbeth qui semble le posséder. On y croit. Mais le divertissement qu’il nous concocte sous la direction du roi des basculements, Dan Jemmett, reste doté d’un rythme un peu trop binaire…
[rating=3]
David Ayala est un sacré interprète. On a pu le voir jouer Richard III sous la direction de Jean-Claude Fall, ou un boucher malfaisant dans le récent Dernier Jour du jeûne. Entre autres rôles. Le voici seul sur le plateau. Attention les yeux. Dans la peau d’un metteur en scène debonaire mais légèrement emporté, il apostrophe chaque membre du public. Public qui incarne, malgré lui, l’équipe technique et artistique du Macbeth que répète cet histrion. Qui complimente par ci, et fait des reproches par là. Qui mime les gestes à effectuer et les attitudes à prendre. Qui donne des références.
Mais ce personnage excessif, c’est David Ayala qui l’incarne. En conséquence, lorsqu’il apostrophe, il parle vraiment au spectateur. Tient son regard. Va jusqu’au bout de sa pensée. Et donne à chacun un rôle et un nom. Lorsqu’il mime, il n’exagère pas trop, préférant faire preuve d’une souplesse étonnante quant à sa corpulence. Lorsqu’il livre ses références, il est capable de vous émouvoir en racontant une scène de Blade Runner. Pour cet exercice de seul en scène, il contourne le cabotinage inutile et le ton potache. Il y croit, à son affaire. On le suit ?
On aimerait bien l’accompagner jusqu’au bout. Hélas, on décroche un peu. Mise en scène de Dan Jemmett oblige, une bascule de lumière le fait, à intervalles réguliers, entrer dans une autre dimension : celle des personnages de la pièce Macbeth, qu’il se met à incarner. De façon intense et tout aussi convaincue. Mais en fin de compte, avec ces bascules, deux caractères s’opposent et ne varient pas assez : le metteur en scène, et le personnage de Shakespeare. La possession par le texte n’enfle pas jusqu’à produire un vrai récit, qui sorte de l’ordinaire. Qui évolue. Qui laisse par terre, sonné. Et l’on se retrouve avec une talentueuse récréation. A laquelle il manque juste un poil de scénarisation, grâce auquel elle pu devenir un exercice de haute volée… David, quand on le tient, on veut qu’il aille jusqu’au bout…
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Visuel : © Michel Corbière