Danse
Sun-A Lee au Centre culturel coréen new look

Sun-A Lee au Centre culturel coréen new look

26 October 2021 | PAR Nicolas Villodre

La danseuse Sun-A Lee s’est produite dans la magnifique salle du Centre culturel coréen qui a fait peau neuve il y a tout juste deux ans en ouverture du festival SOUM et nous a gratifié d’une improvisation en deux parties sur des thèmes musicaux traditionnels.

Avant-garde coréenne

On sait que la Corée a, si l’on peut dire, une tradition en danse moderne depuis au moins la pionnière Choi Seung-hee, connue chez nous sous sa graphie japonaise, Sai Shoki, une disciple de Baku Ishii qui fascina en son temps le public parisien, notamment en 1939, lorsqu’elle se produisit au théâtre de Chaillot, et dont la grâce toucha le rythmicien, musicologue et producteur de films d’avant-garde Émile Vuillermoz  pour qui ne serait-ce que son apparition était “hallucinante de sérénité”. Il est à noter que Sai Shoki donna cette même année un récital, pas bien loin de l’actuel siège du centre culturel coréen : salle Pleyel.

Le journal le Ménestrel en rendit compte le 23 juin 1939, considérant que cette “très belle artiste (…) interprétatrice et créatrice tout ensemble (…) possède du rythme un sens rare, un sens physique (…). La vie coréenne tout entière paraît autour d’elle et en elle, depuis ses espiègleries irrévérencieuses jusqu’aux aspirations bouddhiques, en passant par les rêves de l’amour et les fiertés guerrières.” Ferdinand Reyna, dans  le journal Notre temps, décrivit quant à lui les mains et le jeu de mains de la danseuse : “Au cours de la danse elles paraissent parfois guider l’artiste, plutôt que la suivre. Les doigts, dans le monologue mystique coréen, ont un jeu plus sobre que dans les “mudras” hindous.”

Sun-A Lee en solo

À la différence de son aînée, Sun-A Lee ne cherche pas à reconstituer les danses traditionnelles coréennes qui sont, heureusement, de nos jours, mieux connues qu’avant-guerre. Elle ne représente pas non plus des “scènes mimées” quoique son costume sobre et sombre s’apparente à une académique occidentale et non à une tenue typique ou folklorique. La musique, elle, est plus classique, enregistrée, faute de moyens ou pour raisons pratiques, et non délivrée live. Ici, elle n’est ni tout à fait percussive ni strictement rythmique. Jouée de main de maître par Hwang Byungki au gayageum, une cithare à douze cordes, elle est surtout mélodique et lyrique. Elle danse debout de manière hiératique et, en un deuxième temps, à même le sol, allongée ou en position assise, telle une Wigman sans masque de sorcière.

Elle parvient étonnamment à fluidifier des gestes des doigts, des mains et des bras (ainsi que des pieds dans la deuxième section de sa variation) qui sont extrêmement déliés, indépendants les uns des autres, en tous les cas contrastés. Là où la brisure menace, la danseuse, par son contrôle, sa technique, son art parvient à donner sinon sens du moins continuité. Là où la couleur locale risque de verser dans l’exotisme ou l’anecdotique, la chorégraphe tend vers l’abstraction et la stylisation. Bref, une belle monstration. Une preuve d’ouverture des plus convaincantes.

Visuel : Sun-A Lee,  octobre 2021 © Nicolas Villodre.

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