
Olivier Dubois, un goût précis pour « l’équilibre des extrêmes »
Roubaix place to be. Déjà du temps de Carolyn Carlson à la tête de l’ex Ballet du Nord devenu Centre National Chorégraphique et peut-être encore plus depuis quelques mois, depuis que le jeune Olivier Dubois a été nommé à la tête de cette scène nationale et qui en guise de geste fondateur lui a redonné son nom de naissance. Le Ballet du Nord revient donc, toujours tiraillé entre hyper local et international. Le metteur en scène de Tragédie voit juste.
De passage à Paris, le roubaisien d’adoption prend le temps d’un déjeuner avec la presse. L’occasion pour nous de le rencontrer et de le questionner. L’homme est bavard sans être verbeux, passionnant et passionné. Il comprend vite l’enjeu d’un tel territoire qui en tout est “le plus” : pauvre, jeune, et pour un quartier : riche. Roubaix est dotée depuis trente ans d’une superbe scène nationale dédiée à la danse à laquelle est accolée une école. Mais, même si Olivier Dubois ne voit pas là son cœur d’action, on ne fait pas de spectacle sans public. Bien sur, la mission d’un tel lieu est d’être ‘un lieu de création et de diffusion”. Lui affirme son objectif : le ballet doit être “un espace accueillant”. Pour ce faire, il va justement falloir non pas chercher mais éveiller le public. Les méthodes sont simples mais efficaces, elles demandent un engagement de terrain proche des idées du TNP époque Vilar reprises notamment par Olivier Py.
Il s’agit d’amener le spectacle là où le public ne vient pas. Il traverse cette région si riche en lieux culturels. Le Colisée, la Rose des Vents…mais autour, entre plutôt ? Un vide certain que le chorégraphe espère combler. Avec un temps fort nommé Jouvence qui invite des artistes locaux, nationaux et internationaux par dizaines à travailler dans les nombreux studios présents au Ballet. Mais aussi avec des performances qui seront données à même la rue, ou, en 2015 au Louvre Lens. Où une déambulation inspirée à la fois par Belphégor et Oum Kathoum fera intervenir des danseurs amateurs habitant Roubaix. Il s’agit aussi de mettre les amateurs sur scène pour leur donner le gout du plateau. Les mémoires d’un seigneur ou l’homme disparu verra la scène être partagée entre un danseur Sébastien Perrault et 40 hommes recrutés et formés en quatre jours.
Bien sur la programmation s’annonce solide. On attend Kader Attou ou encore Maguy Marin et les spectacles d’Olivier Dubois y seront présentés en tournée. Les créations attendront 2016 avec notamment, obsession fantomatique de tout danseur, une relecture en 12 actes du Sacre. Déjà deux ont vu le jour. L’implantation sur ce territoire hybride atteindra son climax à l’été pour Made in RBX, “Trois jours de danse pour et par tous”.
Solide tout comme l’homme qui a du faire face au FN qui voulait empêcher la venue de Tragédie au Grand R, à La Roche sur Yon, et qui n’a pas cédé à la tentation idiote de faire payer à un peuple la folie de ses dirigeants en n’annulant pas sa venue à Tel Aviv en pleine guerre contre Gaza.
Disons qu’Olivier Dubois démarre son mandat sous les meilleurs augures. Tiens, d’ailleurs Auguri sera le nom de l’un de ses prochains spectacles, qui s’annonce : joyeux !
Photos : François Stemmer (portrait d’O. Dubois) et Antoine Tempee
A noter, Tragédie revient dans le Nord dès le 18 novembre, au Phénix de Valenciennes.