
Körper ou les images organiques de Sasha Waltz
Au Haus der Berliner Festspiele, les berlinois ont pu découvrir ou redécouvrir une des pièces emblématiques de la chorégraphe allemande Sasha Waltz, Körper, présenté pour la première fois en 2000 à la Schaubühne lorsque que l’artiste codirigeait l’institution avec Thomas Ostermeier.
Körper est une pièce sur le corps, sa taille, son poids, sa valeur, son histoire, ses particularités et secrets. Sacha Waltz explore toutes les possibilités de représentation des corps combatifs, déchaînés, souples, endurants, affectés, ou maltraités et propose des images originales et percutantes.
Au centre d’un espace nu et sombre : un haut mur noir autour duquel les treize danseurs évoluent dénudés, vulnérables au temps, se battent, s’étreignent. Un des tableaux, devenu culte, place les danseurs enfermés dans une boîte vitrée, une sorte de bocal, dans lequel ils se contorsionnent, se frôlent, glissent et se cognent au ralenti. Sensuelle et contemplative, la scène est d’une extrême beauté. Les sons oppressants et organiques diffusés (souffles, frottements, grincements, grognements) accroissent l’étrangeté du climat. Un univers débridé et insolite naît également de la présence de créatures mythologiques et fantastiques, proches des gorgones et des centaures décrits chez Ovide.
Körper est une pièce iconoclaste et complexe qui interroge. Si la proposition est esthétiquement, plastiquement belle, le plateau extrêmement maîtrisé, les images créées par la chorégraphe puissantes, l’ensemble est froid, surchargé en intentions et en symboles ; Sasha Waltz aborde autant de thèmes que le désir, la chirurgie esthétique, le trafic d’organes, la vieillesse du corps, l’holocauste… et la forme ne parvient pas à éviter un effet « catalogue ».
Au Haus der Berliner Festspiele, le 24 novembre 2016. © Bernd Uhlig