
Ida don’t cry me love, l’idole de Lara Barsacq aux Hivernales
Tous les matins à 11 heures aux Hivernales, l’artiste associée à Charleroi Danse fait une déclaration d’amour à Ida Rubinstein en trois corps et trois voix. Délicieux.
Les Hivernales, c’est le Centre de développement chorégraphique national d’Avignon ; en hiver, il s’y tient un festival du même nom fondé par la regrettée Amélie Grand, et pendant le Festival d’Avignon, le lieu propose son propre événement : On y danse aussi l’été. Et cela donne jusqu’au 20 juillet une programmation contemporaine mais éclectique qui va de la danse à la performance.
Lara Barsacq a grandi avec Ida Rubinstein, il y avait chez elle un grand portrait de la danseuse. Elle s’est naturellement intéressée à sa vie décalée. Branchée sur la modernité, Ida n’était pas bien vue du monde classique. Elle a perdu ses parents très jeune et sa place de femme et juive n’a rien arrangé. Mais elle avait de l’argent et a pu devenir mécène et produire des pièces.
Au plateau, sur lequel se trouve une grande tapisserie où siège un guépard, Lara Barsacq est accompagnée de Marta Capaccioli et Marion Sage. Et ça commence fort. Lara se déshabille, se fait recouvrir de colle et se jette dans les paillettes, coiffe de cabaret elle aussi argentée sur la tête. En image, en voix et en mouvement, la pièce nous fait entrer dans l’écriture super actuelle de Rubinstein. Vous voyez La Danse de Matisse, et bien mettez-la en mouvement, c’est ça.
On fond pour le pas de trois en ronde et pour les lignes où les bras croisent les autres corps. C’est une plongée dans l’avant-garde du XXe siècle qui n’a rien d’une conférence. C’est plutôt une discussion entre amies à laquelle nous sommes conviés. Et parler d’Ida c’est l’occasion pour elles d’aborder toutes les choses et les gens que l’on doit abandonner sur le chemin.
En voyant la pièce on réalise qu’on ne sait rien sur Ida Rubinstein (merci Lara Barsacq). Femme libre et surtout précurseuse. C’est elle qui commande le Boléro à Ravel. Sans Ida, pas de Bolero. Cela veut dire, pas de Bolero par Béjart ni par Pina. Vous imaginez ?
Ida dansait nue, Ida avait un bébé guépard comme animal de compagnie, Ida était la muse de Diaghilev.
Ida don’t cry me love part d’Ida Rubinstein pour poser un manifeste féministe d’aujourd’hui.
Jusqu’au 20– Relâche le 15 –, aux Hivernales. Durée 1H05
Visuel : Stanislav Dobak