
La playlist et l’âge du capitain(E)
Cette semaine, Yo la Tengo, Elbi, Tony Melvil, Agar Agar et Orelsan.
Défaite de famille – Orelsan
Première division, l’ami hyper-hype dont tout le monde sait prononcer le nom tire d’abord son succès d’une aubaine générationnelle. À 36 ans, il cristallise les rêves des jeunes parents tout en s’attirant la bienveillance des plus ados en quête de protection (grand frère, grand-oncle ou même carrément monarque dans le cas de Booba). À part ça, à quoi sert Orelsan ? Sans doute à remonter le niveau moyen, comme l’on relève celui des pays émergents en y inventant une middle class. « Défaite de famille », c’est un peu ça : plus intelligent que la moyenne, mais très en dessous de l’excellence, un peu comme si l’on versait une pincée de Tuche sur la chanson à texte.
Le tango des armes à feu– Tony Melvil
Lui aussi à 36 ans, mais il joue en seconde division. Provincialisme assumé et fenêtre sur le spectacle vivant, le Melvil est mort pour le rap, crépitant d’ambition entre sa formation de violon classique et le rock’n roll à l’ancienne, découvert sur le tard. Du coup, impossible de se prendre au sérieux sans pour autant renoncer à jouer sa carte. Dans sa catégorie, il est déterminé à se faire entendre (“sinon, je resterai chez moi”). Alors il met le paquet, dans un charmant petit contretemps. Album à paraître le 16 mars.
For you too– Yo la Tengo
Troisième division, on s’immerge chez les vétérans du rock indépendant ; ceux qui ont traversé le XXème siècle en fantômes noisy glissant ici sur la galaxie pop avec le cool qui caractérise ceux qui déjà ont eu leur moment de célébrité. Place aux envolées lyriques et introspectives, aux effets de réverbération et de basse complice qui finissent par bâtir un univers qui, en effet, n’existait pas encore, vu sous cet angle. Un art de teachers sans aucun doute.
Fangs out – Agar Agar
Catégorie junior, la vingtaine évanescente et l’idée de jouer à la pompom girls en mode déconne. Un son qui pourrait partir dans tous les sens mais se concentre finalement sur un axe pop qui cristallise son groove dans une sorte de « mou nonchalant ». Précisément la définition d’Agar-agar, du côté japonais. Tout cela ne manque ni de panache ni de pétillement, et pas seulement parce que la petite Garance Marillier (“Grave”) y promène sa frimousse.
Neville – Elbi
La benjamine pour finir, lauréate FAIR 2018 dans le style jeux olympiques d’hiver et coupe de cheveu de jeune page post médiéval qui indique sans doute son accointance avec les îles britanniques que l’on sent , en effet, à deux pas dans ce petit quatre heures que l’on déguste en catimini façon RTT, entre soleil de la hype et impatience glacée.
Visuel : ©Phunk Promotion