Classique
L’ultime symphonie de Tchaïkovski par l’orchestre Pasdeloup.

L’ultime symphonie de Tchaïkovski par l’orchestre Pasdeloup.

28 March 2023 | PAR Jean-Marie Chamouard

Le dimanche 26 Mars 2023» à 16h, l’orchestre Pasdeloup est l’invité de la Seine Musicale. Il interprète sous la direction de Marzena Diakun «Liquid air», une création d’Elzbieta Sikora, le concerto N°1 de Franz Liszt, avec Igor Tchetuev au piano et la 6ème symphonie de Piotr Ilitch Tchaïkovski.

Le 28 Octobre 1893,à Saint-Pétersbourg, Tchaïkovski dirige sa nouvelle symphonie. Son ultime symphonie! Il mourra quelques jours plus tard, le six novembre. Il écrivait deux ans auparavant: «Je pense qu’il me sera donné d’écrire une symphonie exemplaire: probablement je me battrai jusqu’au dernier souffle pour atteindre la perfection sans jamais y réussir . Ce sera une symphonie à programme, un programme plein d’émotions subjectives». La symphonie sera dénommée «Pathétique» par le frère du compositeur. Elle sera jouée en son hommage le 18 novembre et connaîtra un succès posthume.

Cette œuvre est précédée par «Liquid Air» une création symphonique, d’Elzbieta Sikora, présente dans la salle. Née à Lviv le 22 10 1943, elle étudia la composition à Varsovie, puis la musique électro acoustique à Paris où elle vit. Elle travaille à l’Ircam, elle s’est engagée dans un cycle de créations avec l’orchestre Pasdeloup.

Nous entendrons également le concerto pour piano de Franz Liszt qui fut créé à Weimar le 17 02 1855 sous la direction d’Hector Berlioz, avec le compositeur au piano! Une œuvre innovante qui tient de «la grande variation» et de la symphonie concertante, bousculant l’architecture classique du concerto.

L’orchestre Pasdeloup a été fondé en 1861. Le plus ancien des orchestre associatif français veut mettre la musique à la portée de tous, dans la tradition des Concerts populaires créés par Jules Pasdeloup. L’orchestre est dirigé par la jeune cheffe polonaise Marzena Diakun avec vivacité, élégance, dynamisme.

Liquid air: une étonnante création

Grondements sourds des contrebasses, flûtes, dissonances et grincements, cordes frappées, tambours. L’ambiance sonore est surprenante, quelque peu chaotique. Il s’en dégage comme un écoulement d’eau, un souffle d’air dans un tuyau, telle une rafale. Les cordes deviennent vibrantes, éclatantes dans la deuxième partie, accompagnées de curieux claquements secs. Dans la troisième partie le grondement des cordes frappées, les trompettes, les percussions paraissent menaçantes. Menace interrompue par un solo de flûte d’une grande douceur. Liquid air est une œuvre étonnante , mais très expressive et d’une grande inventivité.

Romantisme et innovation:

Quelques accents énergiques de l’orchestre, puis le piano débute le concerto N°1 de Liszt avec force et puissance. La virtuosité du pianiste ukrainien Igor Tchetuev est d’emblée spectaculaire. Le thème s’expose au piano, très mélodieux. C’est une ballade romantique et souriante, langoureuse presque. Un premier mouvement très contrasté, la puissance de l’orchestre symphonique éclate par moments, renforcée par les percussions. Le quasi adagio est une rêverie amoureuse. Une très belle mélodie, le jeu du pianiste est très expressif. Le troisième mouvement est un scherzo, la musique est joyeuse, entraînante. L’orchestration est originale, les arabesques du piano sont mêlées à un malicieux triangle. La virtuosité reprend ses droits dans l’allegro final d’un grand volume sonore Un morceau de bravoure pour le pianiste. Un crescendo spectaculaire conduit à l’apothéose finale.

Le Requiem de Tchaïkovski

Le basson et les contrebasses. Seuls. L’ambiance est funèbre puis l’adagio devient allegro, les violons exposent un thème plus vif, moins triste aussi. Le premier mouvement de la symphonie traduit les sentiments contradictoires, intenses de Tchaïkovski. Les moments très mélodieux et les élans romantiques alternent avec des accents tragiques, renforcés par les cuivres et les percussions. L’orchestration est très riche, très originale, mise en valeur par l’énergie de Marzena Diakun.

«Un sourire entre les larmes», le deuxième mouvement est une valse… à cinq temps. Une mélodie chatoyante, enjôleuse qui se répète pour le plus grand plaisir de l’auditeur. Le troisième mouvement est un scherzo vif et rythmé. C’est une tarentelle, une danse qui nous éclaire du soleil de l’Italie du Sud. La musique est légère, enjouée. Mais peu à peu une marche se met en place accompagnée de roulements de tambour. Les accents deviennent martiaux, la marche est très énergique, très rythmée, la puissance de l’orchestre symphonique est impressionnante.

Fait inhabituel, la symphonie se termine par un mouvement lent. Avec l’adagio lamentoso, le contraste est complet avec les mouvements précédents. L’auditeur retrouve l’atmosphère inquiétante du premier mouvement. Le jeu des cordes est déchirant, puis la musique se fait plus douce, comme une tentative de consolation. Le très beau solo des trompettes apporte tristesse et recueillement. Des sentiments violents s’expriment aussi, les glissandos sont spectaculaires. Puis le calme revient un calme glacial. Comme au début le basson et les violoncelles rendent l’atmosphère funèbre . A la fin seules demeurent les contrebasses comme si le voile de la mort recouvrait la musique.

Une création originale, un concerto virtuose et romantique, une symphonie particulière émouvante: l’orchestre Pasdeloup nous a offert un concert mémorable. Un bel après midi de musique symphonique.

Visuel:©JMC

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Jean-Marie Chamouard

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