La blonde et le Bunker, Jakuta Alikavazovic se lance dans le noir futuriste
L’auteure originale des “Corps Volatils” et du “Londres-Louxor” offre avec “La Blonde et le Bunker” un néo-polar aux accents mystérieux. Arrimé à la terre ferme et bourgeoise du triangle amoureux, “La blonde et le Bunker” finit par flotter comme un aéronef futuriste autour de la blonde photographie d’une femme fatale un peu sadique. Un roman original, très mystérieux mais qui, comme un bon David Lynch, laisse son lecteur salutairement perplexe.
Gray tombe dans les filets de séductrice d’Anna, une photographe à succès et femme très séduisante. Il la suit dans sa demeure bobo de Montmartre, qu’il découvre bientôt scindée en deux : un étage pour John, l’ex-mari et ex-romancier, tombé en disgrâce et un pour Anna, très versatile dans ses relations à Gray qu’elle peut délaisser des jours entiers. Gray reste, malgré les humiliations, attiré par la femme fatale,certes, mais également parce qu’il n’a pas beaucoup mieux qui l’attend dehors. Une photo de John romancier fait alors irruption. Autour de cet élément brisé et obsédant, Gray se met sur la piste d’une mystérieuse collection d’art, la collection Castiglione.
Délaissant les fils incandescents des questions identitaires qui orientaient son héroïne dans les labyrinthes du “Londres-Louxor“, Jakuta Alikavazovic donne dans le noir c’est noir. Avec tout l’art post-moderne que son écriture tranchante et quasi-cinématographique permet. Mais également avec force précision et passion du collectionneur. Il y a du Borgès dans ce petit texte si bien ficelé, et une réflexion dense sur la disparition même des signes. Un beau texte, serré et cohérent et qui sait jouer avec les nerfs de son lecteur.
Jakuta Alikavazovic, “La blonde et le Bunker”, L’Olivier, 204 p., 16.5 euros. Sortie le 23 août 2012.