
“La vie conjugale”, un roman de moeurs viennois écrit en hébreu par David Vogel
Après le succès de l’inédite et étonnante Romance Viennoise, parue l’an dernier, L’Olivier republie un autre livre écrit en hébreu par l’écrivain d’origine ukrainienne et mort déporté en 1944, David Vogel. La vie conjugale est un vrai roman viennois des années 1930, social, précis et un peu cruel, écrit par un personnage complètement fascinant…
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Avant même d’ouvrir les pages “traduites de l’Hébreu” de La vie conjugale, on sait que la vie de l’auteur est un roman : naissance en Russie, dans la partie qui est aujourd’hui l’Ukraine, études à Vilnius, passage par la Palestine, internement comme juif-autrichien en 1940, puis passage mystérieux jusqu’à 1944 où l’on retrouve la trace de sa déportation et de son extermination. Entre-temps, il y a une oeuvre, plus viennoise que celle de collègues juifs-autrichiens nés et grandis dans l’Empire. Si l’on a pu citer Joseph Roth et Arthur Schnitzler pour tenter de situer l’inédite Romance Viennoise, la cruelle et quasi-entomologique, Vie Conjugale – déjà publiée chez stock dans les années 1990 – est plus proche de Musil (pour la coupe à vif dans la société via de longs monologues à plusieurs) et de Werfel (pour l’observation patiente de la montée du nazisme). Cette romance précipitée entre un écrivain juif sans le sous, sans oeuvre et velléitaire, avec une baronne dure, un peu nymphomane et très manipulatrice ne fait pas de quartier, ni au couple en général, ni à Vienne en particulier… Aussi noire que jubilatoire.
David Vogel, La vie conjugale, trad. Michel Eckhard Elial, L’Olivier, 464 p., 15.90 euros. Sortie le 21 mai 2015.
visuel : couverture du livre