
“Oliver ou la fabrique d’un manipulateur” de Liz Nugent
Oliver et Alice ont tout du couple parfait : ils se sont mariés après un coup de foudre, et travaillent main dans la main puisqu’elle illustre les livres pour enfants qu’il écrit. Cependant, cette belle apparence vole en éclat le soir où Oliver agresse Alice avec une violence inouïe, à tel point qu’il la plonge dans un coma profond. Commence alors l’étude fine et profonde de la véritable personnalité d’Oliver, alors que son entourage, aussi bien que lui-même, évoquent les épisodes clefs de son parcours, jusqu’à la révélation finale. À mi-chemin entre roman policier et cas psychologique, Liz Nugent signe ici un récit glaçant.
Ce qui frappe à la lecture de Oliver ou la fabrique d’un manipulateur, c’est l’intensité de la narration, qui s’installe peu à peu, pour connaître une gradation qui happe le lecteur au fur et à mesure des chapitres. Car si le roman commence avec la dissection d’un sordide fait divers familial, on comprend rapidement qu’il y a bien plus q’une seule facette au personnage central d’Oliver, orphelin de mère, élevé par un père qui n’a cessé de le rejeter, et, finalement, incapable de distinguer le bien du mal alors qu’il bâtit sa vie sur un mensonge.
Si le roman tire quelques ficelles parfois un peu faciles, il est intéressant de le lire de plusieurs manières : comme une étude comportementale, bien sûr, celle d’un homme façonné par une enfance particulière, et qui détruit tout ce qu’il tente de construire. On peut aussi le lire comme un thriller psychologique diablement bien ficelé : chaque fin de chapitre donne envie d’entamer le suivant afin de mieux cerner le personnage d’Oliver.
Oliver ou la fabrique d’un manipulateur est le premier roman de l’Irlandaise Liz Nugent, et il est passionnant de voir comme la romancière s’attache à décrire la société irlandaise aussi bien que le personnage éponyme du livre. Influence de l’église catholique sur les consciences, principalement, qui rendent difficiles à assumer son homosexualité, une grossesse hors mariage, la responsabilité vis-à-vis de sa famille … Un portrait de l’Irlande contemporaine assez sombre, mais qui ajoute une autre dimension à la dissection du parcours d’un psychopathe proposé par Liz Nugent.
Oliver ou la fabrique d’un manipulateur, de Liz Nugent. Traduit de l’anglais (Irlande) par Edith Soonckindt. Éditions Denoël. Paru en septembre 2015. 256 p. 20,50 €.