
Le pays du lieutenant Schreiber, Andrei Makine au secours d’un grand résistant Français
L’auteur du Testament Français écrit un texte autour des mémoires difficilement publiées et rapidement mise au pilon du lieutenant Jean-Claude Servan-Schreiber, grand résistant et homme de presse de premier rang. Dénonçant l’indifférence dans lequel le pays, devenu vulgaire et oublieux, se serait laissé tomber, Makine exprime les silences qui ont entouré l’écriture et l’édition de ces mémoires d’un homme de 90 ans qui a aimé la France du même amour que De Gaulle …
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A la publication de sa lettre d’amour à un pays mythique, Cette France que l’on oublie d’aimer, André Makine reçoit une invitation d’un lieutenant à aller boire un Whisky. Il connaît certains résistants dont Makine parle dans son livre et aimerait les évoquer en sa compagnie. Mais le lieutenant n’est pas n’importe-qui : homme-siècle, issu de la famille Servan-Schreiber, juif d’origine allemande engagé volontaire pour défendre la France en 1940, le courageux résistant est devenu après la Guerre un influent homme de presse qui a fréquenté les plus grands. Aprpochant des 90 ans, il se dit qu’il est arrivé à ce grand âge peut-être dans le but de laisser un témoignage. Enthousiaste, Makine se met alors en quête d’une maison d’édition pour ce grand homme à la biographie palpitante. Mais dans la France de 2009-2010, l’héroïsme et le passé ne sont plus des centres d’intérêt viables, si bien qu’il se heurte à de nombreux refus. Jusqu’à ce qu’un autre “gentleman” décide de publier le lieutenant Schreiber. Tête haute : Souvenirs sort aux éditions Pygmalion, non seulement à perte, mais dans une indifférence médiatique absolue.
L’immense auteur d’origine russe et de langue Française se fait ici redresseur de torts. La cause est noble, l’amour de Makine pour la France est toujours aussi beau, le personnage d’ancien résistant élégant qui ressemble à Kirk Douglas demeurent est extrêmement touchant. Et l’idée d’écrire les silences qui entourent la publication des mémoires d’un homme qui a été puissant est excellente, d’une grande force littéraire potentielle. Mais, trop indigné pour suivre le chemin où le mènerait sa plume, Makine se cabre et se répète avec toute la monotonie que peut générer une réaction mal menée. Le livre s’essouffle pour devenir un prêche où même le personnage principal disparaît. Dommage que Makine ait laissé la littérature à la porte de ce nouveau roman; elle aurait mieux défendu que lui cette “certaine idée de la France” riche et cruciale, par delà le passéisme. Mais même dans la France de ces années-là, il fallait être bon avocat pour faire entendre son amour et ses valeurs…
Andreï Makine, Le pays du lieutenant Schreiber, Grasset, 220 p., 17 euros. Janvier 2014.
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2 thoughts on “Le pays du lieutenant Schreiber, Andrei Makine au secours d’un grand résistant Français”
Commentaire(s)
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Sophie
J’ai trouvé au contraire que ce récit était tout à fait remarquable. N’avez-vous pas été touché(e) à l’évocation de cet ami Piotr pour qui l’écho de l’histoire de Jean-Claude Servan-Schreiber a été salvateur? Car le message principal de ce livre est là: la fraternité et l’entraide peuvent sauver le monde. Et puis Makine évoque à mi-mot son expérience en Afghanistan en tant que soldat.
yael
Makine m’a vraiment déçue avec ce roman. Mais je suis heureuse que certains ont pu y trouver de l’émotion. Merci pour votre commentaire Sophie. Bien à vous. Yaël