Essais
« Gore & Violence » sous la direction de Christophe Triollet : Quand la peur fascine

« Gore & Violence » sous la direction de Christophe Triollet : Quand la peur fascine

30 May 2021 | PAR Julien Coquet

Auscultant les recoins sombres du septième art, ce premier volume de Darkness, collection qui rassemble à l’heure actuelle six volets, s’intéresse principalement au cinéma d’horreur et à la représentation de la violence.

Christophe Triollet, Directeur de la collection Censure & Cinéma et superviseur de cet ouvrage, rappelle dès sa préface le pouvoir des images, et ce d’autant plus lorsqu’elles sont impressionnantes. Affiches de films, couvertures de magazines (notamment Mad movives), bandes-annonces regardées d’un œil : ce qui fait peur et rebute attire. Si la violence attire, elle questionne forcément : d’où nous vient cet attrait pour le sang (« Le cinéma gore, c’est grave ? ») ? Et, plus angoissant, la vision de films violents peut-elle conduire au passage à l’acte comme certains l’affirment ? L’article « La violence est parmi nous » fait un point sur la question, ne se permettant pas de trancher entre les deux positions, celle d’une violence regardée qui n’aurait pas d’effet sur le spectateur, et celle d’une violence regardée qui encouragerait le spectateur à commettre des actes répréhensibles.

Les articles réunis ici sont tous issus du fanzine Darkness, imprimé et distribué par Sin’Art de 2010 à 2016. De la figure du croque-mitaine à l’affaire entourant le film Martyrs de Pascal Laugier, de la représentation de la violence sur nos petits écrans à une analyse poussée des cinémas de Lucio Fulci, Paul Verhoeven et David Cronenberg. Les articles proposent une réelle approche et une analyse pertinente d’un genre souvent méprisé par la critique cinématographique. L’article « Paul Verhoeven. Goor, vous avez dit goor ? » retrace ainsi la carrière du réalisateur hollandais du début de sa période américaine (La Chair et le Sang) à l’affirmation de ses choix et à la reconnaissance critique pour Black Book.

L’intérêt de ce premier ouvrage, avant la spécialisation de la collection dans des thématiques particulières (Sexe & déviances, Politique et religion, Video nasties…), est de dresser un portrait global de la mouvance gore et du cinéma d’horreur (définition des genres, analyse de films célèbres, etc). Pour autant, l’ouvrage s’aventure dans des chemins plus tortueux, pour le bonheur de ceux qui souhaiteraient pousser l’analyse plus loin : « Lucifer Valentine. Sympathy for the devil », « Torture inquisition et sorcellerie au cinéma », « Conflits de génération, suicide et ultraviolence. Tabous cinématographiques d’une jeunesse sacrifiée »…

« Paradoxalement, si la critique cinématographique reconnaît aujourd’hui aux slashers des qualités qu’elle leur déniait il y a trente ans, dont la délicatesse scénaristique de punir de mort violente les psychopathes et les assassins sanguinaires, elle condamne avec la plus grande sévérité la gratuité morbide des torture porn, Edelstein allant même jusqu’à comparer le jaillissement du sang qu’ils inspirent au spasme de l’éjaculation mécanique du spectateur – voyeur confronté à des images destinées à éveiller ses instincts les plus vils. L’excitation provoquée par les corps pénétrés par les lames ou les sexes est mise dans le même sac, et permet à ses détracteurs de pointer du doigt une violence sans morale en la positionnant au rang de la pornographie, amalgamant pour l’occasion les films proposant des scènes de violence simulée à ceux contenant des scène de ses non simulées. »

Darkness 1 (Gore & Violence), sous la direction de Christophe Triollet, LettMotif, 344 pages, 24 €

visuel : couverture du livre

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Julien Coquet

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