Cinema

Mostra de Venise ep. 2 : Michael Shannon, Kad Merad & Zac Efron

31 August 2012 | PAR Raphael Clairefond

30 août 2012. Autour du palais, l’affluence très raisonnable et le cadre bucolique impulsent un rythme de croisière tranquille au festival. Pour un peu, on se croirait presque dans un modeste festival de province. Le ciel lourd de Venise se teinte toutefois d’un bleu électrique menaçant, troué de quelques rayons pour faire joli sur les photos. Hélas, on peut dire qu’avec The Iceman, présenté en compétition, le nouveau venu Ariel Vromen n’a pas vraiment fait souffler un vent de fraîcheur. Le restant étant à l’avenant, la chronique du jour se donne des airs de bulletins scolaires pour les trois acteurs phares : Michael Shannon, Kad Merad et Zac Ephron. Et autant vous dire qu’ils méritent à peu près tous un avertissement travail.


Le film du jour : The Iceman d’Ariel Vromen

Don't mess with the Shannon

Dans ce polar ancré dans les 60’s, Michael Shannon est un tueur à gages psychopathe cachant à sa famille la nature de ses lucratives activités. Le critique bienveillant évoquerait probablement un « rôle taillé sur mesure », mais franchement, avec tout le respect que l’on doit à cet acteur majeur de ces dernières années, il faudrait peut-être qu’il cesse de se fourvoyer dans ces rôles de fous furieux qui, systématiquement, font voler en éclat leur masque de placidité au cours d’épiques crises de nerfs. Shannon, dirigé par Jeff Nichols dans Take Shelter ou même à la limite dans Boardwalk Empire, la série de Scorsese, est magnétique, fascinant, à fleur de peau… Mais devant la caméra d’un honnête faiseur sans imagination, affublé de diverses postiches, il n’est plus que la caricature de lui-même, réduit à quelques tics agaçants.

Il faut dire qu’il n’est vraiment pas aidé par Vromen qui n’a strictement rien à dire, ni rien à apporter au polar américain. Pour le rôle principal du mafieux, il sort Ray Liotta de sa quasi-retraite pour lui faire rejouer une énième fois les scènes d’intimidation et de règlement de compte les plus éculées. Wynona Ryder, autre star un peu sortie des radars ces dernières années, n’est pas mieux servie dans le rôle de l’épouse dévouée du tueur. On se demande bien quel esprit sadique il faut développer pour lui faire tourner une scène de rencontre bien gênante, dans laquelle cette actrice d’âge mûr doit mimer l’adolescente nunuche tripotant nerveusement son collier de perles. Terminons ce triste tableau du casting par le plus pathétique d’entre eux : David Schwimmer, autre illustre has-been, tué par le ridicule de son rôle d’homme de main benêt, portant catogan, bacchantes et 20 kilos en trop dans son jogging.

Perdue dans un scénario confus qui ne sait jamais quoi faire des talents du tueur qui ne remet jamais en question sa sanglante vocation, cette petite troupe de comédiens n’a plus qu’à gesticuler dans leurs costumes d’époque qui sentent bon la reconstitution académique au formol. Un bien triste jeu de dupes qui se clôt sur un quasi-point Godwin : le portrait du vrai-tueur-qui-a-vraiment-refroidi-plus-de-100-gus, avec ses dates de naissance et de décès. In loving memory

Kad Merad dans Superstar de Xavier Giannoli

Leave Kad alone !

Puisque ce billet s’intéresse aux acteurs, faute de films intéressants, disons deux mots de Kad Merad dans le Superstar de Giannoli, actuellement en salles. En deux mots : un homme normal devient un beau jour célèbre sans que personne ne soit capable d’expliquer pourquoi. L’homme de la rue, le quidam, le gentil beauf, Kad Merad sait faire. On a pu s’en rendre compte dans le larmoyant Je Vais bien ne t’en fais pas. Ici, il porte le pull jacquard et la mine défaite avec une aisance digne des plus grands de l’Actor’s Studio. Blague à part, son jeu se résume à un air constamment ahuri qu’il cesse d’arborer pour piquer une ou deux crises à force de ne pas trouver la clé de ce cauchemar kafkaïen.

Giannoli a choisi de traiter son sujet comme un thriller noir, absurde et (qui se voudrait) grinçant. Le propos est pourtant convenu, caricatural (le bas peuple fait les stars sur internet, l’aristocratie des médias monte la sauce pour faire du fric) voire carrément embarrassant (que penser du rapprochement entre le bas peuple gueulard et les débiles légers ?).

Kad Merad se demande à longueur de film « Pourquoi ? ». Et on se prend à rêver d’un Quentin Dupieux aux manettes qui aurait assumé avec jubilation une réponse simple : « No reason », plutôt que de chercher à faire le portrait d’une époque dont il n’a pas grand chose à dire à part quelques banalités de café du commerce.

Zac Efron dans At Any price de Ramin Bahrani


Hiiiiiiii....Zac Efrooooooooon !

Après avoir fricoté avec Nicole Kidman dans Paperboy (présenté à Cannes), le minet Zac Efron, enfant star de la saga High School Musical, s’offre dans At any price Heather Graham (dans un silo à grain, s’il vous plaît) et poursuit son apprentissage des choses de la vie avec des femmes d’expérience.

On attendait pas mal du nouveau film de Ramin Barhani, auteur du très remarqué Chop Shop. Las, nous avions encore une fois rendez-vous avec Lady Deception. Cette histoire de fils d’agriculteur partagé entre ses rêves de course automobile et la reprise de l’affaire familiale, filmée à peu près aussi platement qu’un téléfilm M6 ne suscitera jamais le début d’esquisse de la moindre curiosité. Au final, on ne vous spoilera pas grand chose en révélant que le giron de la famille sort encore une fois grand vainqueur de cette chronique campagnarde.

Zac Efron fait ce qu’il peut pour donner de l’épaisseur (musculaire plus que psychologique) à ces tourments d’adolescents, mais il vaut essentiellement pour sa plastique d’apprenti gigolo. A ses côtés, Dennis Quaid, un autre revenant des 90’s, interprète son père et réussit à paraître encore plus crispé que Shannon dans The Iceman. Plutôt crédible au début en bras de chemise à carreaux, il finit par être si paralysé par ses grimaces affligées qu’on aurait tout aussi bien pu se perdre dans la contemplation d’un arrêt sur image.

Bref, on espère oublier très vite cette belle brochette de cancres pour vous raconter des choses un peu plus excitantes demain. Arrivederci.

Crédits photo : © Millenium Films, Wild Bunch Distribution

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