Cinema

Hommage à Jacques Demy : de son enfance jusqu’à Lola (1931-1961)

17 November 2008 | PAR loic

demyÀ l’occasion de la sortie DVD de l’intégralité des films de Jacques Demy, La boîte à sorties rend hommage à ce cinéaste en revenant, tout au long de la semaine, sur sa carrière. Chaque jour, nous verrons comment Jacques Demy a élaboré sa filmographie dans la plus grande cohérence. Retour sur les traces d’un cinéaste dont la poétique reste, aujourd’hui encore, d’une modernité bouleversante.

Jacques Demy voit le jour le 5 juin 1931 à Pontchâteau, dans la banlieue nantaise. Son père est garagiste, sa mère, coiffeuse. Il se passionne rapidement pour les spectacles de marionnettes, surtout pour ce qui se passe derrière le rideau. Cette fascination pour les coulisses de la création va se confirmer lorsqu’il transformera le grenier de ses parents en studio : il y filme des marionnettes de carton, image par image. D’autre part, il fréquente assidûment les salles obscures nantaises, environ deux fois par semaine. Il rencontre Christian Jacque, de passage à Nantes, qui l’encourage à poursuivre ses efforts de création. En 1949, Jacques Demy intègre l’École Technique de Photographie et de Cinéma, à Paris, rue de Vaugirard. Son film de fin d’études, Les horizons morts, est très inspiré du cinéma de Robert Bresson et traduit le sentiment de désespoir des adolescents.

Il fait la rencontre de Paul Grimault, maître de l’animation en France, réalisateur du Roi et l’Oiseau et travaille avec lui pendant quelques temps. À cette période, Paul Grimault est dans une mauvaise passe : il a été dépossédé de son dernier film La bergère et le ramoneur et survit en faisant des films publicitaires. Jacques Demy devient ensuite l’assistant du documentariste Georges Rouquier, cinéaste qui a obtenu un succès phénoménal et foudroyant avec Farrebique, chronique entre documentaire et fiction sur la vie paysanne.

demyEn 1956, Jacques Demy tourne son premier film, un court-métrage produit par Georges Rouquier, Le Sabotier du Val de Loire. Le film est tourné dans les lieux de son enfance et rend ainsi hommage à la famille qui l’a accueilli de 1943 jusqu’à la Libération. Il réalise ensuite quatre autres courts-métrages qui vont être la preuve d’une profonde recherche stylistique : Le Bel indifférent (1957), Musée Grévin (1958), La Mère et l’enfant (1959) et Ars (1959).

La fin des années 50 voit l’émergence d’un nouveau mouvement cinématographique : La Nouvelle Vague. C’est à cette époque qu’il rencontre sa compagne, Agnès Varda. La Nouvelle Vague, en privilégiant un cinéma spontané et tourné en extérieur est le cadre parfait pour donner naissance à son premier long-métrage : Lola. Le film sortira en 1961.

demyLola est un véritable bijou où s’entremêlent les destins de personnages qui n’ont, a priori, rien à voir. Lola, une danseuse de cabaret, y attend désespérément son ancien mari, qui l’a quittée sept ans plus tôt pour aller faire fortune. Mais tous les hommes qui croisent cette Lola sensuelle et enfantine tombent sous son charme. C’est le cas de Roland Cassar, personnage principal du film qui l’aime depuis son adolescence. Lola et Roland vont se retrouver, par hasard, dans les rues de Nantes. Commencent alors des réactions en chaîne entre tous les personnages du film. Chaque personnage secondaire est lié intiment, par ses faits et gestes, à l’intrigue principale. C’est, à l’époque, d’une telle modernité que ce dispositif narratif se retrouve largement aujourd’hui dans ce qu’on appelle les « films choral ».
De plus, Lola laisse pressentir l’importance qu’aura la musique dans ses films. Plus qu’un accompagnement, elle joue un rôle primordial. Dès son premier long-métrage, Demy n’hésite pas à adopter une mise en scène assez complexe : il multiplie les longs travellings, les plans-séquences et des éclairages méticuleux. Le résultat est d’une maîtrise réellement étonnante. Lola est dirigée de main de maître.

Certes, le film s’inscrit dans le courant Nouvelle Vague dans le sens où il est basé sur une certaine spontanéité des dialogues et un tournage en extérieur. Mais Lola reste néanmoins un film radicalement différent des Quatre cents coups ou d’À bout de souffle. Ses films suivants l’attesteront, Lola est le point de départ d’une poétique du cinéma qui ne cessera de s’enrichir tout en restant particulièrement fidèle à elle-même.

L. Barché

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