Arts
<em>Huit Maîtres de l’ukiyo-e</em>… ou l’art de l’estampe japonaise

Huit Maîtres de l’ukiyo-e… ou l’art de l’estampe japonaise

28 September 2011 | PAR Justine Hallard

Expo­si­tion événement pour la Maison de la culture du Japon à Paris qui présente, en collaboration avec le Musée natio­nal d’Art Asiatique de Corfou, plus de 150 estampes de la collection Manos. Manos qui consacra une vie à rassembler 1600 estampes avant d’en faire don à l’État grec et de s’éteindre en 1928… année même de l’ouverture du Musée natio­nal d’Art Asiatique de Corfou. Aujourd’hui est présentée pour la première en France cette collection jusqu’ici confidentielle, avec des pièces majeures des plus grand Maîtres de l’ukiyo-e : Harunobu, Kiyonaga, Utamaro, Sharaku, Hokusai, Toyokuni, Hiroshige et Kuniyoshi. Place aux Maîtres, place au sublime.

En japonais, Ukiyo-e ne signifie pas si simplement « Estampes »… mais subtilement « Images du monde flottant ».

Toute une poésie à l’image des fines couches de papier de fibres de murier nécessaires à l’élaboration de ces gravures au raffinement extraordinaire. L’ukiyo-e ou un art de l’illustration, à l’origine populaire, né au 17e siècle pour se poursuivre jusqu’au début du 20e, avec un âge d’or de 1765 à 1868. C’est cette période qui est ici présentée à la Maison du Japon – qui a par ailleurs su parfaitement distiller tout au long de l’exposition les clés de compréhension de cet art unique… car oui, il n’est pas toujours aisé de comprendre au premier coup d’œil (ni au second !) qu’une branche de fleurs de kuria puisse symboliser les six rivières Tama traversées par un noble à cheval !

La première période présentée – la phase intermédiaire de 1765 à 1800 – nous invite, à travers les œuvres de Harunobu et Kiyonaga, dans leurs teintes bambou et d’encre de Chine, à pénétrer cet univers où les concubines et les courtisanes semblaient bien faire tourner la tête des peintres, tant les modèles sont nombreux. Si les corps des élégantes sont longs et élancés, les personnages de Kabuki (théâtre traditionnel épique) sont quant à eux burlesques et sujet à nous faire largement sourire ! Les mangas d’aujourd’hui y ont certainement trouvé bien des sources d’inspiration !

Ces deux thèmes transversaux, femmes (bijin-ga) et représentations de personnages de théâtre (yakusha-e), trouvent leur continuité dans la deuxième phase de l’histoire de l’ukiyo-e, de 1800 à 1868, correspondant à la fin de la période Edo. Les genres et la technique, en revanche, évoluent considérablement. Les femmes deviennent voluptueuses et sublimées sous le pinceau d’Utamaro, les acteurs de Kabuki – en gros plan et sur fond sombre – de Sharaku sont quant à eux devenus des icônes tant les expressions des personnages aux gros yeux ont fait le tour du monde depuis.

Les couleurs deviennent aussi d’une richesse incroyable après être passées par une période rose, c’est l’explosion de couleurs dans une maitrise des nuances absolument parfaite. Les écoles d’ukiyo-e s’affrontent et donnent naissance à une production aussi importante que de qualité.

Le thème du paysage et de la nature devient alors majeur, et atteint son paroxysme avec Hokusai (à qui le musée Guimet avait dédié une magnifique rétrospective en 2008, Hokusai, l’affolé de son art). Ses Trente-six vues du mont Fuji resteront à jamais le symbole même de l’ukiyo-e. D’autres grands Maîtres s’imposent aussi tour à tour, Toyokuni avec ses portraits d’acteurs dont les expressions sont aussi travaillées que les motifs de leurs kimonos. Kuniyoshi, quant à lui, réalise aussi bien des portraits de guerriers aux traits défaits de méchanceté que des illustrations de livres pour enfants dont la modernité est réellement saisissante !

Enfin, Hiroshige prend lui aussi très rapidement ses lettres de noblesse. Ses paysages aux ciels bleu profond, au printemps ou sous la neige, la délicatesse infinie de ses pétales de chrysanthèmes, font de lui l’un des plus remarquables paysagistes du genre même de l’estampe. On se sent plonger tout entier, comme hypnotisé, dans ce bain de couleurs incroyablement chatoyantes, rarement inégalées.

Et c’est effectivement tout entier que cette exposition consacrée aux grands Maîtres de l’ukiyo-e nous a fait plonger dans cet univers absolument fabuleux de l’illustration japonaise d’époque. Un pur ravissement.

Infos pratiques

Journée Paul VEYNE à l’ENS, samedi 8 octobre
Gagnez 5×2 places pour R.A.S (Rhythm Aid Society)au Rex le 13 octobre
Justine Hallard

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