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Le Voyage à Nantes au fil de l’eau

20 August 2021 | PAR Laetitia Larralde

Depuis 10 ans, Le Voyage à Nantes investit la ville et l’espace public avec des créations contemporaines toujours surprenantes. Cette année, embarquez pour thématique aquatique.

La ville de Nantes a énormément changé ces dix dernières années. Le Voyage à Nantes, qui a pour objectif de rendre compte de cette évolution, nous fait découvrir la ville par l’art contemporain. On relit le patrimoine sous un angle différent, ou on découvre de nouveaux aspects de la ville, comme le tramway, les nouveaux quartiers de l’île de Nantes, ou la nouvelle gare. Avec ses 22 km de parcours symbolisé par une ligne verte zigzagant dans la ville, Le Voyage à Nantes propose une déambulation ludique pour tous, habitants ou visiteurs de passage.

L’eau comme fil conducteur

Cette année, les nouvelles œuvres du Voyage à Nantes se retrouvent dans la notion de fluidité. Plusieurs d’entre elles ont un lien plus ou moins direct avec l’eau. La plus impressionnante est Le Naufrage de Neptune, d’Ugo Schiavi. Son bateau de commerce, échoué sur la fontaine de la place Royale, laissant l’eau ruisseler des fissures de sa coque rouillé, raconte le lien de Nantes à la navigation fluviale et maritime, représentée par la fontaine, tout en le plaçant dans l’univers de science-fiction du roman Sécheresse de J.G. Ballard. Un peu plus loin, Ugo Schiavi fait ressurgir un fragment de statue de Neptune sur les bords de la Loire, visible au gré des marées.

Sur les vestiges de la porte Sauvetout, le castor à queue de poisson de Laurent Le Deunff, issu d’un traité de médecine médiéval, commence la construction de son barrage avec cet arbre échoué en cœur de ville. Il souligne le décalage de ce vestige du patrimoine au milieu des constructions modernes tout en rappelant avec humour les conceptions approximatives zoologiques qui classaient le castor en être à la fois mammifère et poisson. Au Temple du Goût, Bianca Bondi s’inspire de l’histoire des armateurs locaux pour créer sa Faint House of Yes. Dans ce mélange entre temple chamanique, spa et laboratoire de chimie, l’artiste nous plonge dans une atmosphère éthérée où les odeurs se succèdent, les matériaux se transforment et l’esprit se purifie.

Pour une fluidité montée sur roulettes, la grande piste de roller derby Versus de l’agence d’architecture Titan occupe la majorité de la place Graslin. Les rollers viennent s’insérer dans le flux de cyclistes du quartier et le piste est pensé en écho à l’architecture qui l’entoure. En septembre, elle accueillera des matchs et des initiations au roller derby, réintégrant ainsi le sport en centre-ville. Un peu plus loin au Passage Sainte-Croix, Ulla von Brandenburg s’attaque elle aussi à l’architecture du lieu avec ses larges pans de tissu dégoulinant des murs et des plafonds. Ses vagues de couleurs nous guident entre ses installations et ses vidéos dans un univers où la couleur domine.

Arrêt au Château des ducs de Bretagne

Au Château des ducs de Bretagne, l’eau s’invite par le Water cargo de Romuald Hazoumè, accompagné des bidons transformés en mur de masques dans la cour du château. Son exposition Expression(s) décoloniale(s) #2 se poursuit dans les salles du musée d’Histoire de Nantes (voir notre article) pour une réflexion sur l’esclavage d’hier et d’aujourd’hui, la migration et la transmission culturelle, complétée par l’historien Gildas Bi Kakou.

Dans la Tour du Fer à cheval du château, trois parfumeurs (Marc-Antoine Corticchiato, Bertrand Duchaufour et Mélanie Leroux) ont été conviés à créer un parfum représentant la ville de Nantes. Le public est invité à les découvrir dans une scénographie pensée par l’Atelier Polyhedre sur le thème de l’eau, de la Loire et ses marées où l’on peut se concentrer sur son odorat. Ils ont également conçu le flacon dans lequel sera commercialisé le parfum pour lequel le public aura voté.

Le château accueille également l’artiste japonais Toshihiro Hamano. Le paravent en quatre parties de 36 mètres de long est la pièce principale et la plus spectaculaire de l’exposition. Terminé en 2005 pour le temple Chûgû de Nara, il dépeint la vie du prince Shôtoku, mort il y a 1400 ans, sur des panneaux de laque noire couverte de poudre d’or, selon la technique du maki-e. Un cours d’eau traverse la totalité du paravent, au travers de 70 scènes de la vie du prince et de plantes symbolisant les quatre saisons. Autour, on pourra admirer une série d’œuvres sur papier récentes sur le thème du pavillon de thé, où géométrie et sérénité règnent.

De Nantes à Saint-Nazaire par l’estuaire

Pour continuer sur la thématique aquatique, embarquez pour la croisière Estuaire. De la gare maritime de Nantes jusqu’à Saint-Nazaire, on découvre en 2h30 les 33 œuvres installées le long du fleuve. Les 60 km de l’estuaire offrent des paysages extrêmement variés, allant de la réserve naturelle aux sites industriels en passant par les petites villes de pêcheurs.

Le parcours débute sur les rives de Nantes, qui concentrent près de la moitié des œuvres du parcours, dont les Anneaux de Daniel Buren, installés en face de la HAB Galerie où l’on peut visiter l’exposition de Gilles Barbier, Travailler le dimanche (voir notre article). On aperçoit également le Lunar Tree de Mrzyk et Moriceau, à qui l’on doit l’animation présentant Nantes qui accueille les voyageurs dans la nouvelle gare.

Des artistes de renommée internationale ont été invités à créer des œuvres sur l’idée du paysage, de l’art et du fleuve. Ici, on aperçoit les Settlers de Sarah Sze, ours, jaguar et singes accrochés aux arbres et perdus dans les feuillages, là le bateau mou (Misconceivable) d’Erwin Wurm est coincé sur une écluse, plus loin La Maison dans la Loire de Jean-Luc Courcoult s’enfonce dans le sable du fond du fleuve et la Villa Cheminée de Tatzu Nishi permet de surveiller le marais et ses roselières. Arrivés à Saint-Nazaire, après ce plein d’air et de soleil, on pourra s’étonner devant les dernières arrivées dans la collection Estuaire : Le Pied, le Pull-over et le Système digestif de Dewar et Gicquel.

Les 6 et 7 septembre, pour terminer la saison, se tiendra un colloque sur le thème du tourisme du futur. Après les chamboulements dus à la pandémie, comment aborder le futur du tourisme ? Et le 10 septembre se tiendront la nuit des Tables de Nantes pour un voyage culinaire dans la gastronomie nantaise, et la nuit du VAN avec concerts, musées en entrée libre et autres évènements dans toute la ville. Laissez-vous porter par le courant créatif et ludique du Voyage à Nantes !

Le Voyage à Nantes
Du 03 juillet au 12 septembre 2021

Visuels :1- Le Voyage à Nantes 2021, Le Géant de Nantes, 2020, Éric Croes © Philippe Piron – LVAN / 2- Le Naufrage de Neptune, Ugo Schiavi, Place Royale, le Voyage à Nantes 2021 © Martin Argyroglo – LVAN / 3- The Faint House of Yes, Bianca Bondi, le Temple du Goût, le Voyage à Nantes 2021 © Martin Argyroglo – LVAN / 4- Un castor sur un arbre couché, Laurent Le Deunff, Porte Sauvetout, le Voyage à Nantes 2021 © Martin Argyroglo – LVAN / 5- Versus, TITAN © Esquisse TITAN, photographie Poltred

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Laetitia Larralde
Architecte d'intérieur de formation, auteure de bande dessinée (Tambour battant, le Cri du Magouillat...)et fan absolue du Japon. Certains disent qu'un jour, je resterai là-bas... J'écris sur la bande dessinée, les expositions, et tout ce qui a trait au Japon. www.instagram.com/laetitiaillustration/

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