Expos
Gérard Garouste: « Ma mise en scène de l’absence »

Gérard Garouste: « Ma mise en scène de l’absence »

08 September 2022 | PAR Melissa Chemam

 

 

Rétrospective colossale, une des expositions incontournables de la rentrée, le Centre Pompidou a dédié ses salles à l’œuvre de l’artiste Gérard Garouste, 76 ans, probablement l’un des peintres français encore vivants les plus importants.

 

Dès la visite presse en présence de l’artiste, l’effervescence incomparable de son oeuvre saute aux yeux. Préparez-vous à un parcours hautement visuel mais surtout littéraire. Gérard Garouste s’explique avec bonhomie, et plonge directement dans ses références faites de textes, de mots, de langues, de mythes grecs, rabelaisiens ou bibliques. « La peinture est secondaire », déclare-t-il même quand on l’interroge.

Rassemblant des tableaux pour la plupart immenses, ainsi que des oeuvres graphiques et des sculptures, inspirés aussi bien de son passage au ‘Palace’ parisien que de ses passions livresques, ses rêves puis ses folies, les 18 salles du dernier étage du Centre Pompidou ont de quoi fasciner et surprendre. 

Organisé en ordre chronologico-thématique, le parcours fait écho aux différentes inspirations de l’artiste, né en 1946, formé aux Beaux-Arts de Paris, mais « se méfiant des idées d’avants-garde », selon ses propres mots, très tôt lassé des débats entre les anciens et les modernes, les classiques et les nouveaux, prétendants à la rupture. On y apprend d’abord que ses premières expositions datent de la fin des années 1960, après des travaux comme décorateur de théâtre. Peintre de la figuration, il évolue ensuite vers plus de symbolisme. 

Les premières salles sont essentiellement consacrées à ses tableaux des années 1980, où il répond visuellement à des grandes périodes de l’histoire de l’art, notamment européen, grec et classique, passant du portrait aux natures mortes, à travers des tableaux de plus en plus ambitieux et démesurés, certains inspirés de fables rabelaisiennes et de leur humour. Les personnages y côtoient animaux, miroirs et vases ; les couleurs chatoient progressivement. 

Plus tard dans sa carrière, le peintre se plonge dans de grandes oeuvres littéraires classiques, notamment le mythe de Don Juan, La Divine Comédie de Dante puis le Don Quichotte de Cervantes. Au cours des années 1990, il découvre les conférences des rabbins Philippe Haddad et Marc-Alain Ouakin, et se passionne alors pour les études aussi bien de la Bible que de la langue hébraïque. Cette poursuite intellectuelle et spirituelle lui inspire des toiles époustouflantes et des collaborations avec des institutions et éditeurs juifs. Selon l’artiste, l’exposition aurait même pu/dû s’intituler ‘La Mégilla d’Esther’, ce qui en hébreu veut dire ‘Le dévoilement du secret’. 

A la fin de la décennie, Garouste s’investit dans des études de plus en plus poussées du Talmud et du Midrash, et la question de l’interprétation des textes bibliques et de leur traduction l’obsèdent. Ses tableaux sont consacrés à des scènes de plus en plus symboliques ; de nombreuses scènes figurant des ânes se succèdent, non sans rappeler parfois un petit air de Marc Chagall… 

D’autres oeuvres révèlent aussi les talents de décorateurs de l’artiste, ainsi que sa folie… Lui qui a connu de grandes phases de dépression et de délire, entre des périodes de passions intellectuelles profondes qui l’ont sauvé de l’errance. Des portraits de sa femme Elisabeth, ses enfants et ses proches, racontent ses liens plus intimes ; des paysages reviennent aussi sur son rapport à la Bourgogne, d’où vient sa famille, ainsi qu’aux nuits parisiennes dont il fut un adepte.

Dans les dernières salles, d’autres inspirations littéraires s’imposent, offrant des portraits tendres et poétiques de Frantz Kafka par exemple. Des oeuvres datant de 2020 et 2021 s’affichent dans la dernière salle, illustrant l’incroyable caractère prolifique d’un peintre sans égal…  Et pourtant, Gérard Garouste nous confie :« Il faut imaginer les tableaux entre les tableaux. Cette rétrospective est une mise en scène de l’absence… ».

On sort éblouis par tant de puissance, de récits et d’histoires, de couleurs et de symboles lancés sur les toiles comme des tourbillons. A ne pas manquer. 

Informations:

Du 7 sept. 2022 au 2 janv. 2023 

Tous les lundis, mercredis, vendredis, samedis, dimanches : de 11h à 21h

Tous les jeudis : de 11h à 23h

Fermé le mardi

Site: https://www.centrepompidou.fr/fr/programme/agenda/evenement/1c7rCxA 

Visuel : affiche
 
 
Rumena Buzarovska : Mon cher mari
Après La Fin de Dennis Kelly mis en scène par Philippe Baronnet
Melissa Chemam

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration