Actu
Histoire brève de l’immigration chinoise en France

Histoire brève de l’immigration chinoise en France

31 May 2014 | PAR Carlos Dominguez-Lloret


Parmi sa population, la France compte aujourd’hui avec un grand nombre d’habitants venus de Chine. La plupart de ces migrants se sont installés dans la région d’Île-de-France et beaucoup d’entre eux ont tout quitté pour se forger un futur meilleur dans l’hexagone. Selon le dernier recensement de l’INSEE, en 2008, il y avait en France métropolitaine 80.312 personnes nées en Chine et 11.691 enfants de moins de 18 ans nés d’au moins un parent né en Chine. La communauté chinoise a été constituée par  plusieurs vagues migratoires,marquées par des époques très différentes.

L’histoire de l’immigration chinoise en France est bien complexe. Dans le cadre de notre dossier, nous pensons qu’il est important de mettre en perspective l’histoire qui relie la France et la Chine dans le contexte migratoire qui a tenu lieu depuis le XVIIème siècle.

Les premiers chinois sont arrivés sous le règne de Louis XIVShen_Fo-tsung

Shen Fuzong (1657-1692)

Le premier chinois qui est venu en France fut Shen Fuzong. Fuzong est né à Nankin et il s’est converti au catholicisme dans sa jeunesse. Le jeune chinois a quitté son pays pour la première fois avec le procureur des missions jésuites en Chine, Philippe Couplet, afin de rencontrer le pape à Rome.

Le voyage en Europe de Shen Fuzong a duré onze ans et le 15 septembre 1684 il est présenté au roi Louis XIV. Fuzong va montrer au roi comme écrire les caractères chinois et fait une démonstration de l’utilisation des baguettes.

Arcade Huang (1679-1716)

Arcade Huang est un converti chinois, qui s’est rendu à Paris grâce aux missions étrangères. Huang s’est installé dans la capitale en 1704. Ses protecteurs ont voulu le former afin de le ramener en Chine où il était censé tenir un apostolat. Cependant, l’homme a préféré la vie civile et il est devenu l’interprète chinois de Louis XIV.

Les principaux travaux d’Arcade Huang sont menés grâce à l’aide de l’historien et linguiste Nicolas Féret. Parmi ses travaux, Huang est parvenu a élaborer le premier lexique chinois-français, la première grammaire du chinois et la diffusion en France du système des deux cent quatorze clefs de Kangxi, système nécessaire à l’élaboration de son lexique.

La migration chinoise en France au XXème siècle

Au cours du XXème siècle, la France a connu plusieurs vagues migratoires provenant de la Chine.

La migration chinoise en France signifie un fait sociologique complexe et elle est aussi marquée par les différentes circonstances qui ont pu traverser ce pays tout au long de son histoire. 

La belle époque chinoise à Paris

En 1911, avant La Premiere Guerre mondiale, il y avait déjà environ 283 chinois sur le territoire français. Ce petit groupe concentré majoritairement en région d’Île-de-France a été composé par des intellectuels anarchistes, étudiants, journalistes et quelques commerçants.

Les “travailleurs célestes” de la France

CoolierestingLorsque la Grande Guerre a éclaté en 1914, la France ne comptait pas avec la main d’oeuvre requise pour travailler la terre. C’est ainsi que l’Etat a décidé de prendre sous contrat 35,000 chinois pour les engager dans des tâches agricoles. En 1915, le lieutenant-colonel Georges Truptil est parti à Pékin et il a embauché des jeunes ouvriers pour travailler la terre. Les contrats de ces jeunes hommes attirés par des perspectives d’une vie meilleure ont stipulé 10 heures de travail par jour, 7 jours sur 7.  Ces “travailleurs célestes” comme ils étaient surnommés ont cru qu’ils venaient en Europe faire fortune sans savoir que la guerre ravageait le continent. Au cours de la Première Guerre mondiale, ces travailleurs agricoles ont aussi participé à la construction et à la réparation de lignes de chemins de fer et de dépôts de munitions. Ils ont aussi aidé dans les services de santé et dans le déminage des terrains. Une bonne partie d’entre eux a aussi participé aux efforts de reconstruction d’Ypres après la Grande Guerre.

La Madeleine et Gare de Lyon accueillent la communauté chinoise

Après la Grande Guerre un bon nombre de chinois ont refusé de rentrer en Chine et ils se sont installés près de la Gare de Lyon. Ces ouvriers recrutés pendant la Première Guerre mondiale ont réussi a ouvrir des petits commerces et quelques magasins sur place. Ces petits commerces ont été appelés boutiques de chinoiseries.

Après la Première Guerre mondiale, un autre type de population chinoise s’est aussi installé à Paris. Dans le quartier de la Madeleine ils ont occupé le 8ème et le 9ème arrondissement. Ces chinois provenaient en grande majorité de la ville de Jiangxi et de Zhejiang. La plupart d’eux ont été issus de l’élite des marchands chinois et ils se sont installés a Paris pour faire du commerce avec des meubles, laques et céramiques.

La communauté chinoise arrive au quartier des Arts et Métiers

Après la Deuxième Guerre mondiale il y a eu une vague migratoire des chinois originaires de Wenzhou qui se sont installés près du quartier des Arts et Métiers. Ce groupe s’est dédié aux métiers de la confection. A cette époque, la population chinoise en France est estimée à 20.000 personnes environ, jusqu’aux années 70.

Les années 70 et la constitution du “triangle de Choisy”

Tour_super-italiePendant les années 70, la vague migratoire la plus importante est venue du Sud-Est de l’Asie. La plupart des gens issus de cette vague vont s’installer dans le XIIIème arrondissement. Dans cette période Il est estimé qu’environ 60.000 chinois se sont installés en France. Cette vague provint de Chaozhou, ville côtière du Sud-Est de la Chine. Ces gens sont aussi connus comme les Teochew. La plupart d’eux sont des chinois issus de la diaspora qui a quitté sa Chine natale il y a quatre siècles.

Cette communauté chinoise s’est établie dans toute l’Asie du Sud-Est, notamment au Vietnam, au Cambodge et au Laos. L’intégration de cette population en France a été privilégiée par le fait qu’elle a vécu dans les colonies françaises et elle a pu devenir francophone. Malgré cela, les gens diplômés ne furent pas reconnus par l’Etat français et ils se sont ainsi tournés vers le commerce pour gagner leur vie.

Dans le XIIIème arrondissement, au sud-est de Paris, il existe ce qu’on appelle le triangle de Choisy. Ce “triangle d’or”, formé par l’avenue de Choisy, l’avenue d’Ivry et le boulevard Masséna, a été l’endroit où se sont concentrés une grande partie des immigrants chinois pendant les années 70. Cette communauté a décidé de s’installer dans ce quartier parce qu’ils ont trouvé des appartements encore vides dans les grandes tours construites à la porte de Choisy.

Ces tours boudées par les parisiens à cause de leur architecture entourent le centre commercial des Olympiades. Ce centre commercial est représentatif de l’effervescence commerciale qui agite le XIIIème arrondissement aujourd’hui. Dans ce quartier, les chinois ne représentent que le 3% de la population, mais il faudrait aussi dire que Paris est la ville où vit la plus grande communauté chinoise d’Europe.

Des horizons au-delà du “triangle de Choisy”

Belleville est un des plus vieux quartiers de Paris. Le quartier qui a vu “la Môme” Piaf naître a toujours été un quartier qui a accueilli la migration provenant de différents coins du monde. Depuis quelques années Belleville est devenu la destination préférée de plusieurs membres de la communauté chinoise de France. Aujourd’hui sur ses 60.000 habitants, 20.000 environ sont des chinois. Ce qui représente un habitant sur trois.

Les chinois qui n’ont pas trouvé d’espace dans le XIIIème arrondissement se sont installés sur l’axe Faubourg du Temple-Belleville et ils sont allés jusqu’au métro Couronnes sur les deux côtés du boulevard de Belleville. Pour s’installer ils ont racheté les commerces maghrébins et ils ont ouvert des boutiques de chinoiseries près du métro Belleville. Les magasins discount qui ont tenu lieu sur le boulevard de la Villette ont aussi cédé leur places à des immenses supermarchés chinois.

Gao Xingjian: un prix Nobel franco-chinois

L’écrivain et dramaturge Gao Xingjian est né en 1940 à Ganzhou mais la polémique suscitée par ses œuvres l’a forcé à s’exiler en 1987. Après les événements de la place Tian An Men il a écrit la pièce La fuite. Cette pièce a entraîné comme conséquence l’interdiction totale de ses œuvres en Chine. En 1989 Xingjian a obtenu l’asile politique en France.

En 1992 Gao Xingjian est nommé Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres et au cours de l’année 2000 il est aussi nommé Chevalier de la Légion d’Honneur par Jacques Chirac.

Les œuvres de Gao Xingjian ont été très influencées par Antonin Artaud et Samuel Beckett. Xingjian a aussi traduit en mandarin les œuvres de Jacques Prévert et d’Henri Michaux. Grace a ses traductions il a rendu accessible au public chinois une partie importante de la littérature française.


Image Shen Fuzong © Godfrey Kneller

Image Coolie © Circa 1900

Image tour Super-Italie © Hughes Mitton

Playlist de la semaine spéciale Chine
Le Festival du Film Chinois en France en est à sa 4e édition
Carlos Dominguez-Lloret

One thought on “Histoire brève de l’immigration chinoise en France”

Commentaire(s)

  • tong

    Je suis intéressé la livre

    March 16, 2016 at 23 h 18 min

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration