
Les fusions rigoureuses de Sarah Murcia à la Philharmonie
On a loupé Anne Pacéo mais pas Sarah Murcia, l’une des quatre femmes qui ce week-end ont dirigé l’un des huit groupes présentés à la Philharmonie pour ce « jazz en VF».
Du Français, il y en aura même dans le texte avec cette reprise de «Volonté avec un nuage de lait» du regretté Denis Scheubel et de sa formation de l’époque (Big mini), reprise que Sarah Murcia pousse d’un cran vers la musique improvisée, disposant pour ce faire de son tout nouveau quartet. François Thuillier très étonnant au tuba, Olivier Py presque hard bop lorsqu’il se lance en solo et Benoît Delbecq entre piano et électronique, un peu l’homme à tout faire de ce tour du chant qui travaille la polyphonie et la discontinuité dans l’esprit typique de la contrebassiste.
De quel esprit s’agit-il? D’un esprit rigoureux sans aucun doute (on l’a entendu avec Steve Coleman) mais également de quelque chose de volage qui butine à plusieurs sources, chez John Lurie Carla Bley, dans cette ambiance fiévreuse où se mêlent le jazz et la préférence underground, l’obscurité des âmes et la chaleur des établissements ouvert la nuit. Sur des textes intrigants, composés pour l’essentiel par Vic Moan qui tire l’inspiration du côté des esthétiques rock et urbaines.
Une heure de spectacle et une petite dizaine de morceaux qui laissent à chaque instrumentiste le loisir de s’exprimer dans ce format Eyeballing, vif et saccadé qui gravite donc sur ses territoires que Murcia explore depuis toujours, «jazz mutant, rock post-moderne, chanson différente». À la contrebasse au clavier ou au chant, elle remet en forme ce qu’elle braconne ailleurs, notamment avec Rodolphe Burger dont on retrouve ici les partis-pris électroniques : Meteor show et, surtout, Psychopharmaka. Mais, en fait qui influence qui? Bien malin qui saura répondre à cette question.
(concert enregistré, prochainement diffusé sur Arte)
Visuel : Sarah Murcia @DR