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Cannes 2019, Semaine de la critique : “La Danse du serpent” nous invite en terres de croyances sud-américaines

Cannes 2019, Semaine de la critique : “La Danse du serpent” nous invite en terres de croyances sud-américaines

19 May 2019 | PAR Geoffrey Nabavian

Dans ce premier long-métrage, présenté à Cannes 2019 à la Semaine de la critique, la réalisatrice Sofía Quirós Ubeda révèle un œil de cinéaste, discret et singulier. A l’image de son héroïne, jeune observatrice dont le mystère fascine.

C’est un film où les plans apparaissent très maîtrisés et précis sans être clinquants, et les séquences oniriques, figurées avec une simplicité et un mystère assez captivants. Sûre de ce qu’elle cherche mais absolument pas pressée, soucieuse d’accoucher d’une belle image mais aussi de lui laisser sa respiration, la caméra de la jeune réalisatrice Sofía Quirós Ubeda (issue du programme Next Step, et présente à la Semaine de la critique 2019) observe. Elle prend le temps de capter le monde qu’elle explore, et ce faisant, elle choisit de s’approcher du cœur de son sujet lentement, afin de mieux le cerner, puis le donner à sentir. Les scènes qu’elle signe apparaissent vibrantes, d’autant plus qu’elles ne livrent pas tous leurs secrets tout de suite.

Héroïne fascinante

La jeune Selva, héroïne du film, adopte sur le monde un point de vue très personnel, qui semble à la fois imprégné par d’anciennes croyances et très conscient de la réalité de l’endroit où elle vit – un petit village perdu dans une forêt tropicale d’Amérique du Sud – en même temps que traversé par des instants d’innocence. De scénario avec péripéties, ici, il n’est pas vraiment question : le film accompagne cette jeune fille dans son rapport à des croyances précises – touchant à la mort, surtout – qui se mêle à des scènes qui peignent son quotidien.

On l’observe enterrer un serpent, qui se réincarnera ensuite, selon sa pensée, sous une autre forme, ou encore dialoguer avec une femme a priori morte, qui continue son existence sous la forme d’une ombre. La caméra enregistre les gestes et rituels (on doit saluer ici la force de jeu de la jeune actrice Smachleen Gutiérrez), et prend aussi le temps de cadrer le visage de cette jeune fille, et de le laisser être expressif. Et mystérieux… En d’autres instants, on la voit plus insouciante, davantage dans le monde réel et pleine de vie. Insouciante, jusqu’à ce qu’elle soit confrontée à la dureté de la réalité, qui amène tout à coup son regard à se noircir et ses traits à se durcir…

Navigant entre différentes thématiques et différentes ambiances, avec un fil narratif tout de même présent – une proche de l’héroïne disparaît, bouleversant son existence – La Danse du serpent est aussi accompagné par une belle musique, distillée au compte-goutte. Et il donne à rencontrer le magnifique personnage du grand-père (impressionnant Humberto Samuels), lui aussi cadré en des plans ouverts, évocateurs sans être appuyés. Un film qui donne envie de voir dès à présent les futurs travaux de sa réalisatrice en tout cas.

La Danse du serpent est présenté à Cannes 2019 dans la section Semaine de la critique.

Retrouvez tous les films des différentes sections dans notre dossier Cannes 2019

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Visuel : © Eurozoom

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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