
Prima Donna : quand Nathalie Stutzmann chante Vivaldi à Montpellier
La semaine était chargée à Montpellier avec l’avant-première et la Première de Carmen (qui a lieu ce soir), mais aussi avec le récital de Nathalie Stutzmann et de son ensemble Orfeo 55 qui se tenait mardi soir. Le programme rendait hommage à la voix de contralto qui occupe une place d’honneur dans l’oeuvre lyrique de Vivaldi, qui bien que majoritaire dans la soirée n’en restait pas moins accompagné par les noms de Lully et de Rameau.
La soirée a débuté avec le Concerto pour cordes RV 157 qui plonge la salle dans l’excellence de la soirée et d’Orfeo 55, toujours à un niveau aussi élevé tandis que les intentions de la direction musicale sont étonnamment claires et lisibles, et ce tout au long de la soirée. La soirée mettant à l’honneur la voix de contralto, Nathalie Stutzmann poursuit avec “Io sento seno” et l’on sent que l’artiste est peut-être plus fatiguée ce soir qu’elle ne l’était lors de son dernier récital entendu in loco car la projection se fait moins puissante qu’à l’accoutumée, sans pour autant être décevante bien sûr. Lully s’invite ensuite à la fête avec la danse extraite de la Marche pour la cérémonie des Turcs durant laquelle l’un des deux violoncellistes se sert du dos de son instruments pour servir de percussion. Vivaldi revient à nos oreilles avec l’air “Sento in seno” durant lequel les pizzicati offrent une incroyable impression de légèreté. Les extraits de Bajazet (le récitatif “E morto si…” et l’air “Svena, uccidi, abbatti, attera”) permmettant à la contralto de partager son implication théâtrale en laissant voir et entendre le personnage furieux.
Rameau arrive de son côté avec la célébrissime Danse des Sauvages pris ici dans un tempo plus rapide qu’on a l’habitude de l’entendre, ce qui est fort agréable et d’autant plus entraînant, laissant par ailleurs apprécier la virtuosité des musiciens de l’ensemble. La première partie se clôt alors par l’adagio du Concerto pour cordes RV 156 et “Gelido in ogni vena” d’Il Farnace, exacerbé mais toujours dans la justesse.
La seconde partie de la soirée ne laissera entendre presque uniquement que des oeuvres de Vivaldi, à l’exception de la Passacaille extraite d’Armide de Lully. Ainsi, après “Degl’Elisi dal soggiorno”, le Concerto pour basson RV493 fait un bel effet auprès du public avant que Nathalie Stutzmann n’enchaîne directement avec “Vedro con mio diletto”. L’air “Ferri, ceppi, sangue” de L’incorazione di Dario poursuit la soirée avant la Sinfonia en 3 mouvements de L’Olimpiade là aussi pris avec un tempo rapide. C’est d’ailleurs un autre extrait de cette même oeuvre, “Gemo in un punto e fremo” qui offre une fin magistrale après le Concerto pour cordes RV109.
Une belle soirée dans l’ensemble et toujours un plaisir d’entendre Nathalie Stutzmann et son ensemble (en résidence à Montpellier), tant pour le chant que pour sa direction à la fois intelligente et sensible, douce et dynamique. Le public a d’ailleurs eu droit à deux bis, le premier laissant entendre les basses profondes et ambrées de la contralto qu’il aime tant, le second, après un clin d’oeil de la cheffe, offrant un moment convivial puisqu’il a débuté par ses claquements de doigts pour marquer le rythme avant de se clore par un ultime claquement de doigt et un sourire de connivence.
© Florence Riou (images du concert) et Simon Fowler pour le portrait.