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Les portraits présidentiels du Général de Gaulle à François Hollande

Les portraits présidentiels du Général de Gaulle à François Hollande

06 June 2012 | PAR Fairouz Guedouar

La photo officielle de François Hollande a été révélée ce lundi 3 juin et  fait déjà l’objet de commentaires et critiques. C’est aussi l’occasion de faire un point sur les portraits des anciens présidents et de comparer.

Le portrait officiel du président est une photographie chargée de symboles qui réunit les éléments fort du programme qui ont fait élire le candidat.

Le portrait le plus symbolique est celui du Général de Gaulle, le premier président de la Vème  République. Il se tient debout dans la bibliothèque du palais de l’Elysée et porte la panoplie  complète du chef de l’État (Grand-croix de la Légion d’honneur et le collier de Grand Maître de  l’Ordre de la Libération) sur son habit d’officier général. Il porte un regard lointain, sur sa gauche  comme pour exprimer les projets qu’il a pour la France, et repose sa main droite sur deux livres:  la Constitution de la Vème République et l’Histoire de l’armée française.

 

 

 

Des présidents érudits?

Le choix de faire sa photographie dans la bibliothèque du palais de l’Elysée tend à faire passer un certain message.
Georges Pompidou se positionne dans la lignée du Général de Gaulle avec un portrait quasi-identique à la différence près qu’il ne porte pas son regard dans la même direction.
François Mitterand, le premier président socialiste de la Vème République, choisit aussi la bibliothèque en apportant une touche de modernité. On le retrouve assis, décontracté, Les essais de Montaigne dans les mains et le regard fixe vers les français. Nicolas Sarkozy est le dernier en date à avoir occupé cette pièce dans laquelle il ajoute le drapeau tricolore ainsi que celui de l’Union Européenne, rappel de son projet de recréer un lien fort entre la France et l’Europe. Cependant on ne comprend pas le choix de la bibliothèque pour ce président qui n’a favorisé ni la culture ni l’éducation, comparé à ses prédécesseurs qui ont inauguré des musée et bibliothèque pendant leur mandat…

 

 

 

Les portraits bucoliques.

Jacques Chirac connu pour ne pas être à l’aise devant l’objectif signe pourtant un portrait bien novateur. Il est le premier à faire sa photographie dans le jardin de l’Elysée. Il pose avec un léger sourire, penché en avant les mains derrière le dos. Il apporte alors une touche décontractée et marque son attachement au monde rural, bien qu’il ne soit que dans un jardin et non pas dans un champ. Ce lundi le président François Hollande a dévoilé son portrait officiel, on découvre alors qu’il opta pour le jardin. Il se place donc plus dans la continuïté photographique de Jacques Chirac. Etant tous deux élus de Corrèze cela semble justifié. Il existe tout de même des points de convergence entre Chirac et Hollande, l’un cache ses mains derrière le dos, l’autre met les siennes en évidence. Le cadrage est aussi bien différent, plus large pour Hollande et le deuxième plus resérré sur la personne du président. On retrouve plus de nuances dans les couleurs de Raymond Depardon, le photographe de François Hollande.

 

Focus François Hollande

Ce que l’on pourrait reprocher au président actuel est sa posture qui manque d’assurance. Malmené, il a fait l’objet de moquerie et s’est vu surnommé flamby. Ses détracteurs ne le sentent pas à la hauteur de la fonction, on aurait donc pu s’attendre à un portrait affirmant le contraire avec une attitude plus assurée. Le portrait est tout de même original et simple, où le caractère du président dit « normal » ressort.
A noter que la position des mains de François Hollande est nouvelle. Auparavant soit on ne les voyait pas du tout comme avec Jacques Chirac ou Valéry Giscard d’Estaing, soit on n’en voyait qu’une comme dans le portrait de Nicolas Sarkozy, soit les deux sont présentes sans être clairement apparentes, on retient là le portrait de François Mittérand. A l’ombre des arbres François Hollande semble vouloir exprimer qu’il est au service de l’institution qu’est la présidence, mise en lumière avec l’Elysée ensoleillé dont une petite partie est recouverte du drapeau tricolore ainsi que de celui de l’Europe. Le format paysage de la photographie permet de balayer le jardin comme pour représenter le territoire de la France.

C’est donc un portrait novateur, simple et à la fois riche en interprétations dans lequel le président Hollande paraît honnête et sans mystère dans une position malheureusement trop statique.

 

Le choix déterminant du photographe.

La question qui subsiste est de savoir si le photographe apporte réellement sa touche au portrait ou si le choix de l’artiste n’est finalement que symbolique?

En 1871 Adolphe Thiers avait été le premier président à utiliser la photographie pour son portrait officiel. Le Général de Gaulle est quant à lui le premier président à voir un portrait couleur. C’est Jean-Marie Marcel qui réalisa son portrait. Il était un portraitiste de la période de la libération plus que des années 1960. Georges Pompidou eut recours au photographe François Pages, un photographe de presse qui inscrit le portrait du président dans une modernité que l’on ne retrouve pourtant pas. C’est donc ici un choix symbolique.

Valéry Giscard d’Estaing fait appel à Jacques Henry Lartigue, grand nom de la photographie qui le fait poser devant le drapeau français et non devant la traditionnelle bibliothèque de l’Elysée et rompt alors avec l’esthétique classique de la photographie dans la bibliothèque. Jusqu’à présent c’est le seul portrait qui manifeste une réelle rupture avec la tradition du portrait officiel. C’est la seule image cadrée à l’horizontale, une idée imposée par son auteur, qui apporte donc son cachet.

François Mitterrand choisit Gisèle Freund, âgée alors de 87 ans et portraitiste de grands écrivains (André Malraux, Jean-Paul Sartre, Marguerite Yourcenar, Samuel Beckett). Le portrait n’est donc pas surprenant étant donné le caractère de l’artiste. Gisèle Freund semble avoir été libre pour réaliser ce portrait décontracté.

Jacques Chirac fait un choix audacieux et inattendu, avec Bettina Rheims, réputée pour ses nus provocants de strip-teaseuses ou de jeunes androgynes. Comme dit précédemment c’est le premier portrait en extérieur ce qui  est un évènement en soit et pourtant on ne voit pas l’apport de la photographe controversée dans le portrait.

Nicolas Sarkozy choisit Philippe Warrin qui avait aussi réalisé l’affiche “Ensemble tout devient possible” du candidat. C’est un photographe habitué des personnalités du showbiz qui l’avait suivi pendant sa campagne, réalisant également plusieurs photos de son couple avec Cécilia Attias. Le choix est là moins surprenant, peut-être évoluent-ils dans les mêmes sphères cependant la touche “showbizz” est inexistante, le portrait est plutôt classique mais décalé avec le personnage.

Enfin François Hollande a choisit Raymond Depardon pour sa photographie officielle. A 69 ans, il est une grande figure du film documentaire, il est également connu pour ses photos, au style brut et sobre, sans artifice. Ce qu’il aime c’est photographier «les temps morts»«le temps faible». Le choix de cet artiste paraît symbolique étant donné ses racines modestes et les sujets de ses oeuvres.

En somme seul Jacques Henry Lartigue, Gisèle Freund et de façon plus nuancée Raymond Depardon semblent avoir apporté leur cachet au portrait du président de la république. Les autres photographes, même les plus originaux se sont perdus dans cette institution et ses codes en oubliant chez eux leur personnalité.

Si le choix n’était pas symbolique autant qu’il y ait un seul photographe officiel pour tous les présidents de la république…

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Fairouz Guedouar

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