
Psychedelic Pill, le nouvel album de Neil Young.
Dans l’industrie de la musique, il est d’usage de produire un album tous les deux ans. En la matière, Neil Young nous a habitués à une certaine régularité. Mais “Psychedelic Pill” est son deuxième opus cette année, et il sort dans la foulée de ses mémoires publiées au début du mois (“Une Autobiographie” chez Robert Laffont).
Il y a six mois, avec “Americana”, Neil Young revisitait les chansons qui ont jalonné l’histoire des Etats-Unis, aujourd’hui, c’est sa propre histoire dans laquelle il se plonge. Fixer son passé sur différents supports comme une urgence pour ne rien oublier, “Psychedelic Pill” sonne comme un antidote. Malgré sa rupture d’anévrisme il y a sept ans, et le fait qu’il ait du renoncer à ses pétards quotidiens, Neil Young est encore là, avec sa voix parfois trop haut perchée, accompagnée d’accords lourds parfois jusqu’à la dissonance.
Contrairement au précédent, ce nouvel album ne contient que des compositions originales. Il s’ouvre sur un morceau de plus de 27 minutes intitulé “Driftin’Back”, puis suit “Ramadda Inn”. Cette seconde chanson aborde le temps qui passe dans ce qu’il a de plus concret et de quotidien, celui d’un couple qui a passé sa vie ensemble. L’amour s’égrène, et avec le temps, le devoir finit toujours par prendre le pas sur les sentiments, “She loves him so, she loves him so, she does what she has to…”, comme en écho à ses propres faiblesses, ou à “For the Love of Man”, une ballade dédiée à son fils handicapé. L’enfant qu’on ne cesse jamais d’être, ou celui qu’il a été, est évoqué dans “Born in Ontario”. Dans cet album, près de la moitié des chansons dépassent les 8 minutes, comme un besoin débordant de se raconter avant qu’il ne soit trop tard, ou un moyen de rester avec ceux qui ne sont déjà plus… Neil Young s’y livre comme il ne l’a jamais fait dans un album. Il réussit en plus à le faire sans que l’ambition de laisser une trace n’empiète sur l’intimité de ce qu’il nous livre.
La valeur de “Psychedelic Pill” tient aussi à ça, les souvenirs ne prennent vraiment leur sens et leur profondeur que s’ils nous permettent de regarder en face ce que nous sommes. A 67 ans, Neil Young conserve cette liberté et ce courage.